Le prélude à une action prochaine
publié dans regards sur le monde le 15 mai 2012
Source: Présent du 11 mai 2012. article de Jean Madiran
De l’incarnation Delors
à la présidence Hollande
Dans la vie politique longuement effacée de François Hollande, on avait pas mal oublié un épisode qui ressort avec les biographies actuelles du président élu : dans les années 1992-1995, en vue de la succession de Mitterrand, il s’était activement engagé dans la préparation de la candidature du socialiste
chrétien Jacques Delors (qui finalement renonça à se présenter).
Dix-sept ans plus tard, les revoici tous les deux. Hollande devient
président de la République. Delors est mis en avant par l’Eglise comme
inspirateur et guide de l’« engagement » catholique en France et comme incarnation de Vatican II, selon l’enseignement solennel de l’Institut catholique de Paris approuvé par le cardinal Vingt-Trois et consigné par La Documentation catholique du 15 janvier dernier, pages 92 et 96.
VERBATIM, dans la proclamation adressée à Delors : « Vous incarnez
les options prises par l’Eglise catholique au concile Vatican II » (p. 92), et : « Vous continuerez de guider notre action et d’inspirer nos projets » (p. 96).
Cette consécration fulgurante de Jacques Delors, on le constate, est venue à point. Elle a eu lieu assez tôt : en novembre 2011, et publiée dans La Documentation catholique en janvier 2012, – assez tôt, oui, juste assez tôt pour avoir l’air d’une innocente coïncidence.
Ce qu’a réellement « incarné » le parcours politique de Jacques Delors, – avant d’« incarner les options de Vatican II », – ce fut la dissolution progressive du courant démocrate-chrétien dans le parti socialiste. La gouvernance gauchisante de l’épiscopat français avait longuement recherché, mais en vain, le dialogue et la collaboration avec le parti communiste stalinien. A la suite de Delors, inspirateur et guide, cette
gouvernance s’est ensuite rabattue sur le dialogue et la collaboration
avec le socialisme.
On n’arrête pas d’essayer de comprendre ce qui a pu se passer dans la tête du cardinal Vingt- Trois quand il présidait à une telle énormité. N’y a-t-il vu qu’une exagération rhétorique du Recteur de l’Institut catholique ? Ou bien
avait-il été prévenu et avait-il d’avance approuvé un énoncé aussi catégorique ? Cette seconde hypothèse est la plus vraisemblable. S’il n’avait pas été mis au courant, s’il avait été surpris, s’il avait été scandalisé par le discours du Recteur, comme il aurait dû l’être, il l’aurait manifesté plus ou moins discrètement ou solennellement. Il ne l’a pas fait. Au contraire, après
presque deux mois d’éventuelle réflexion, il a fait ou laissé publier la chose dans La Documentation catholique, toujours sans aucune rétractation, ni même la moindre explication. Que Jacques Delors ait été et doive continuer à être l’inspirateur et le guide de l’engagement temporel des catholiques
français paraît donc au cardinal Vingt-Trois une banalité, une évidence
qui va de soi.
Le 11 octobre va commencer une « année de la foi » qui sera en même temps une célébration du 50e anniversaire de l’ouverture de Vatican II. Si l’on veut nous faire célébrer le Concile en professant obligatoirement un credo où le socialiste Jacques Delors « incarne les options prises par l’Eglise catholique
au concile Vatican II », il risque d’y avoir un fort grabuge.
Nous entrons sous le règne d’une présidence socialiste dont l’esprit et le programme annoncés incitent chaque citoyen, et en particulier
chaque catholique, à réfléchir sur les exigences et sur les limites de son devoir d’état dans une telle situation. Il faudra y ajouter une sérieuse
méditation sur ce que devra être notre attitude à l’égard d’une
gouvernance épiscopale qui demande solennellement au socialiste
Jacques Delors de continuer à guider notre action et à inspirer nos
projets.
JEAN MADIRAN
NB Je m’inscrits dans cette action futur et certaine. PA.