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Entraide et Tradition
O oriens

O oriens

publié dans couvent saint-paul le 18 décembre 2009


Prédication pour le 3ème dimanche de l’Avent

O oriens

MBCF,

 

Pendant toute cette semaine, l’Eglise exprime son attente fervente du Seigneur Jésus par ces merveilleuses Antiennes qu’on appelle les « Antiennes O ». Elles expriment toutes une fervente attente, une attente vibrante du Seigneur.

« O Sagesse qui êtes sortie de la bouche du Très Haut…Venez pour nous enseigner la voie de la prudence »,

« O Adonai, Seigneur, O Conducteur – Dux – de la maison d’Israël…Venez nous racheter par la puissance de votre bras »,

« O Racine de Jesse – Radix Jesse – qui êtes comme l’étendard des peuples…venez nous délivrer, ne tardez pas »,

« O Clavis David – O clef de David…Venez et tirez de la prison le captif qui est assis dans les ténèbres et dans l’ombre de la mort »,

« O Oriens – O orient, splendeur de la lumière éternelle et soleil de justice…Venez et éclairez ceux qui sont assis dans les ténèbres et dans l’ombre de la mort »

« O Roi des Nations et objet de leurs désirs…Venez et sauvez l’homme que vous avez formé de limon »,

« O Emmanuel, notre Roi et notre Législateur, l’attente des Nations et leur Sauveur…Venez nous sauver Seigneur, notre Dieu »

 

Quelle belle poésie ! Quel beau poème qui exprime tout particulièrement l’ardeur de cette attente. Et cette attente fervente exprime l’amour qui occupe le cœur de l’Eglise en cet Avent et de ses fidèles, à l’unisson.

 

Or cette attente du Seigneur ordonne et les fidèles et les prêtres, l’Eglise toute entière, vers l’ORIENT. Car d’une part, le Seigneur se présente dans l’Apocalypse comme « l’étoile brillante du matin » : « C’est moi qui suis le rejeton et le fils de David, l’étoile brillante du matin » (Ap 22 16). Fils de David, Il l’est. Ainsi le présenta à Marie, l’ange de l’Annonciation : « Voici que vous concevrez en votre sein et vous enfanterez un fils et vous lui donnerez le nom de Jésus. Il sera grand. On l’appellera le Fils du Très Haut, le Seigneur Dieu lui donnera le trône de David, son Père » (Lc 1 30)

 

Il est aussi « l’étoile brillante du matin ». Il est donc à l’ORIENT. La lumière se lève à l’Orient. Il est même l’ORIENT : « O ORIENS – O orient, splendeur de la lumière éternelle et soleil de justice. L’Orient, d’où naît la lumière, symbolise le Christ Seigneur. Il est la lumière. Saint Jean, dans son prologue, est formel.

 

Mais, d’autre part, Il est Celui qui doit revenir dans la gloire à la fin des temps et son retour se fera, là encore, de l’ORIENT : « Car comme l’éclair part de l’orient et brille jusqu’à l’occident, ainsi en sera-t-il de l’avènement du Fils de l’homme » ( Mat 24 27)

 

Or, nous qui sommes dans cette attente fébrile de la venue de la Lumière, nous devons dans notre liturgie, pour qu’elle soit vraie, où nous exprimons cette attente vibrante, être tournés « ad Orientem » d’où naît la lumière, d’où jaillit la vie, d’où reviendra le Christ en gloire.
Que serait, MBCF, une assemblée qui se dirait dans l’attente de son maître et qui tournerait le dos à sa venue. Lorsque j’attends quelqu’un, je me dirige vers le lieu où il doit venir. C’est le plus élémentaire bon sens. Si je lui tourne le dos, n’exprimerais-je pas quelque mépris, quelque indifférence. Mon orientation toute tendue à l’accueil de celui qui doit venir exprime mon impatience, ma joie de recevoir celui que j’attends, celui qui doit venir.

 

Il est urgent, MBCF, de garder le symbolisme liturgique – de le reprendre, de le réapprendre – à savoir l’orientation de notre prière, l’orientation de nos autels « ad orientem », tous tournés vers le Seigneur, prêtres et fidèles, unis dans une même foi, dans une même espérance, dans une même charité en Celui qui est la lumière, notre vie.

 

Me permettrez-vous de vous rappeler l’enseignement du cardinal Ratzinger, aujourd’hui Benoît XVI. Nous qui, longtemps, fûmes considérés, faussement, comme des désobéissants au Pontife romain, nous voilà, de fait, devenus ses plus fermes artisans, le soutenant dans son désir de procéder à la réforme de la Réforme. En effet, notre souhait ardent de voir revivre dans l’Eglise, la bonne orientation de la prière, la bonne orientation de la célébration eucharistique, est en pleine conformité à la pensée de Benoît XVI. Il écrivait dans son livre « l’Esprit de la liturgie », dans son chapitre 3 de la deuxième partie : « l’autel et l’orientation de la prière : « La prière vers l’Orient est de tradition depuis l’origine du christianisme. Elle exprime la spécificité de la synthèse chrétienne qui intègre cosmos et histoire, passé et monde à venir dans la célébration du mystère du salut. Dans la prière vers l’orient nous exprimons donc notre fidélité au don reçu dans l’Incarnation et l’élan de notre marche vers le second avènement » (p 63)

 

Il écrivait encore dans la préface du livre de Mgr Gamber : « Tournés vers le Seigneur » ceci : « L’orientation de la prière commune aux prêtres et aux fidèles – dont la forme symbolique était généralement en direction de l’est, cad du soleil levant – était conçue comme un regard tourné vers le Seigneur, vers le soleil véritable. Il y a dans la liturgie une anticipation de son retour ; prêtres et fidèles vont à sa rencontre. Cette orientation de la prière exprime le caractère théocentrique de la liturgie ; elle obéit à la monition : « tournons nous vers le Seigneur » et il conclut : « cet appel s’adresse à nous tous et montre, au-delà même de son aspect liturgique, comment il faut que toute l’Eglise vive et agisse pour correspondre à la mission du Seigneur » Il écrivait cela le 18 novembre 1992

 

N’oublions pas, MBCF, que la liturgie céleste est l’archétype de la liturgie terrestre, de la liturgie de l’Eglise Et en ce sens, la liturgie céleste et la liturgie terrestre ne font qu’un. Or dans l’Apocalypse, je vois que « survint un autre ange qui se plaça devant l’autel un encensoir d’or à la main. On lui remit quantité de parfums à offrir, avec les prières de tous les saints, devant l’autel d’or qui fait face au trône » (AP 8 3) « l’ange…devant l’autel d’or qui fait face au trône de Dieu ». Ainsi la conception selon laquelle l’autel d’ici bas était une image de l’autel céleste devant le trône de Dieu a toujours déterminé son agencement et sa position du prêtre devant Lui : l’ange à l’encensoir d’or se tient devant l’autel, devant le trône de Dieu.

 

Malheureusement une coutume contraire, depuis Vatican II, mais pas selon Vatican II qui n’a donné aucune prescription en ce sens, même tout le contraire – s’est installée dans l’Eglise où l’on voit la célébration eucharistique vers le peuple, « versus populum »

 

Et le cardinal Ratzinger dénonce cette coutume de célébrer l’Eucharistie versus populum. Il écrit, écoutez bien : « l’orientation « versus populum » est l’effet le plus visible d’une transformation qui ne touche pas seulement l’aménagement extérieur de l’espace liturgique, mais explique une conception nouvelle de l’essence de la liturgie : la célébration d’un repas en commun… Il n’y a pas d’autre explication au fait que le repas soit devenu l’idée normative de la célébration liturgique chrétienne. Alors dans cette perspective, on a pu voir se développer une « clérification » comme jamais il n’en a existé auparavant. Le prêtre – devenu l’animateur liturgique – est devenu le véritable point de référence de la célébration eucharistique. Tout se rapporte à lui. Il faut le regarder. C’est sa personnalité qui porte toute l’action. La position du prêtre tourné vers le peuple a fait de l’assemblée priante une assemblée refermée sur elle-même. Celle-ci n’est plus ouverte ni vers le monde à venir ni vers le ciel. .La prière en commun, prêtres et fidèles vers l’est signifiait une marche commune, une procession vers le Seigneur, une marche vers l’orient…ensemble vers le Christ qui vient à notre rencontre. »

 

Le cardinal Ratzinger dit même : « l’orientation commune vers l’est pendant le canon demeure essentielle ». C’est à la page 69 de son livre : « l’esprit de la liturgie ». « Il ne s’agit pas d’un élément accidentel de la liturgie. L’important n’est pas de regarder le prêtre mais de tourner un regard commun vers le Seigneur. Il n’est plus question ici – lors du canon – de dialogue mais d’une commune adoration, de notre marche vers Celui qui vient ».
Et c’est pourquoi on comprend que Mgr Gamber, le maître de Ratzinger en matière liturgique, puisse lui aussi dire : « Personnellement, je tiens l’introduction des autels face au peuple et la célébration orientée vers ce dernier pour beaucoup plus graves et génératrices de problèmes pour l’évolution future que le nouveau missel. Car à la base de cette nouvelle position du prêtre par rapport à l’autel – et il s’agit ici sans nul doute d’une innovation et non d’un retour à une pratique de l’Eglise primitive – il y a une conception nouvelle de la messe : celle qui en fait une « communauté de repas eucharistique » (p 2 de son livre « Tournés vers le Seigneur »)

Restons bien attacher à notre célébration vers l’Orient. Cette orientation est essentiel, du moins, durant la prière du Canon. Amen.

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