Voilà des propos typiquement maçonniques… Paroles d’un évêque, de l’évêque de Moulins
publié dans regards sur le monde le 27 février 2019
L’évêque de Moulins plaide pour la devise de la République
Cri du cœur de Mgr Laurent Percerou :
Pour que cesse toute haine,
Pour que s’ouvrent de nouveaux chemins de fraternité.
Sur les frontons de nos mairies, trois mots sont écrits : liberté, égalité, fraternité. Trois mots qui constituent le socle de la nation française. Trois mots qui ont fait rêver et font rêver encore tant de peuples à travers le monde, soumis à l’oppression, à l’injustice sociale, à l’extrême pauvreté. Trois mots qui appellent au dialogue, à la concorde et à la recherche d’un avenir pour tous, quelques soient nos origines, nos religions, que nous soyons jeunes ou vieux, bien-portants ou porteurs de handicap… Pour le chrétien et l’évêque que je suis, ces trois mots m’invitent à prendre toute ma place dans notre communauté nationale, car ils habitent l’Evangile du Christ, les mots de ma prière. Ils colorent mes écrits, les textes de mes homélies et, je l’espère au moins de temps en temps, mes manières d’être, de penser et d’agir …
Liberté, égalité, fraternité… Certains d’entre nous les auraient-ils oubliés quand le langage des poings, la destruction et le pillage, les cris de haine et les menaces de mort font la une des médias depuis tant de semaines… Comment ne pas réagir, comme citoyen et comme chrétien, quand certains n’hésitent même plus à laisser libre cours à leurs plus bas instincts en recouvrant les portraits de Simone WEIL de la croix gammée, en sectionnant les arbres de la fraternité plantés sur les lieux où avait été retrouvé, il y a 13 ans, le corps supplicié du jeune Ilan HALIMI, ou en inscrivant « JUDEN » sur la vitrine d’un magasin parisien tenu par un frère juif.
Je voudrais ici manifester mon soutien, mon respect pour nos frères et sœurs de confession juive, qui appartiennent à cette communauté qui porte douloureusement le poids de la Shoa et qui pleure encore aujourd’hui tant des leurs qui ne sont jamais revenus de l’enfer. J’exprime tout particulièrement mon amitié à mes frères et sœurs de la communauté juive de Vichy et à tous les frères et sœurs juifs qui vivent dans le département. Je leur dis mon dégoût devant de tels actes, et ma fierté aussi de voir en eux mes ainés dans la foi, porteurs de la promesse. Je sais que lorsque je prie les psaumes, c’est avec eux et pour eux que je me tourne vers l’Unique, le Roi de l’univers.
Disciples du Christ, en ces temps troublés, il nous faut être à la hauteur de notre foi en Lui, le Prince de la Paix. Hommes et femmes de bonne volonté, nous devons être conscients que l’avenir de notre société dépend aussi de nous. Nous en sommes, en effet, à des titres divers, les acteurs : dans nos familles, sur nos lieux de travail, dans les associations, dans nos quartiers et nos villages, dans nos communautés chrétiennes… Devant tant de violence et de haine, alors que quelques vents mauvais soufflent à nouveau, il est temps de condamner, en paroles et en actes, les comportements qui déchirent le corps social et stigmatisent certains de nos concitoyens. Il est temps d’être des bâtisseurs de paix et de justice, en fidélité à notre foi et à notre devise nationale. Les débats qui sont organisés ici et là, même s’ils ne régleront pas à eux seuls tous les problèmes, peuvent être le moyen de rétablir le dialogue et de se découvrir membres d’une même communauté nationale, c’est pourquoi je crois important d’y participer.
Prions pour nos gouvernants qui ne doivent pas simplement éteindre un incendie, mais reconstruire, avec nous tous, une société dont la devise n’est pas qu’une inscription aux frontons des bâtiments publics, mais un idéal à viser, un programme à mettre en œuvre. Il y a urgence !