Benoît XVI et le Sacerdoce.
publié dans la doctrine catholique le 18 février 2010
Benoît XVI et le Sacerdoce.
Recevant, le 16 mars 2009, les participants de l’Assemblée plénière de la Congrégation pour le clergé, présidé par M le cardinal Claudio Hummes, prélat brésilien, cardinal émérite de Sao Paulo, Benoît XVI leur a annoncé, d’une manière inattendue, son intention de lancer une « Année sacerdotale » faisant suite à l’année paulinienne. Son intention était claire : approfondir pour toujours mieux en vivre le sacerdotale. Il leur disait : « la grande tradition ecclésiale a, à juste titre, séparé l’efficacité sacramentelle de la situation existentielle concrète du prêtre…Mais cette juste précision doctrinale n’ôte rien à la tension nécessaire, et même indispensable, vers la perfection morale, qui doit habiter tout cœur authentiquement sacerdotal ».
Aussi « pour favoriser cette tension des prêtres vers la perfection spirituelle dont dépend avant tout l’efficacité de leur ministère, j’ai décidé de proclamer une « année sacerdotale » spéciale, qui ira du 19 juin prochain (2009) au 19 juin 2010 ». Nous étions à quelques mois du début de cette année sacerdotale, le 16 mars 2009.
L’occasion en est la célébration «du 150e anniversaire de la mort du saint curé d’Ars, Jean Marie Vianney, véritable exemple de pasteur au service du troupeau du Christ ».
Aussi le Pape Benoît XVI comptait-il sur les responsables de la Congrégation, sur leurs initiatives, en relation avec les évêques pour « faire comprendre toujours plus l’importance du rôle et de la mission du prêtre dans l’Eglise et dans la société contemporaine ».
Pour le pape Benoît XVI, les choses étaient claires : le prêtre doit chercher sans cesse sa sainteté pour accomplir au mieux sa mission si nécessaire à l’Eglise et au monde.
Et c’est ainsi que le pape concrétisa cette annonce, le 16 juin 2009, par la publication d’une lettre « pour l’indiction d’une année sacerdotale à l’occasion du 150 anniversaire du Dies natalis du Saint Curé d’Ars », la faisant débuter le jour de la solennité du Sacré-Cœur de Jésus, c’est-à-dire, le 19 juin 2009 jusqu’à la même solennité de l’année 2010 :
Voici ses propos : « Chers Frères dans le sacerdoce,
En la prochaine solennité du Sacré-Cœur de Jésus, vendredi 19 juin 2009 – journée traditionnellement consacrée à la prière pour la sanctification des prêtres –, j’ai pensé ouvrir officiellement une « Année sacerdotale » à l’occasion du 150e anniversaire du « dies natalis » de Jean-Marie Vianney, le saint patron de tous les curés du monde. Une telle année, qui veut contribuer à promouvoir un engagement de renouveau intérieur de tous les prêtres afin de rendre plus incisif et plus vigoureux leur témoignage évangélique dans le monde d’aujourd’hui, se conclura en la même solennité de l’année 2010 ».
Et c’est pourquoi Benoît XVI, en de nombreuses circonstances, développe tout un enseignement sur le sacerdoce. Son enseignement, tout à fait traditionnel, est exprimé, dans une formulation nouvelle et riche. C’est ce que nous allons voir.
Pour Benoît XVI, ainsi que pour tous les pontifes romains, le prêtre est essentiellement « l’ami du Christ ». Il se fonde sur l’affirmation du Christ s’adressant à ses disciples : « Je ne vous appelle plus serviteurs, car le serviteur ne sait pas ce que fait son maître ; mais je vous appelle amis, parce que tout ce que j’ai entendu de mon Père, je vous lai fait connaître » (Jn 15, 15).
Cette idée du sacerdoce, comme ami du Christ Seigneur, a déjà été enseignée par Saint Pie X dans son Encyclique Haerent animo . Il affirmait que le prêtre est « la lumière du monde » mais surtout que le prêtre, par la volonté même du Christ, est constitué son « ami ». Il part de la même phrase du Christ « Je ne vous appellerai plus serviteurs…Mais je vous appelle amis parce que tout ce que j’ai appris de mon Père, Je vous l’ai fait connaître…Je vous ai choisis et constitués pour que vous alliez et que vous portiez du fruit » (Jn 15 15-16). Et comme « n’avoir qu’un même vouloir et une même aversion, dit Pie X, est le propre d’une solide amitié », il en déduit que « nous sommes tenus, en qualité d’amis, de conformer nos sentiments à ceux de Jésus-Christ ». Or ce dernier est « saint, innocent et sans tache » (Hebreux 7 26). Tel doit être le prêtre, au titre de l’amitié qui lui est donnée, au titre de son ministère qui est de le prêcher. : « Envoyés par Lui, nous devons gagner l’esprit des hommes à ses doctrines et à sa loi, en commençant d’abord par les observer nous-mêmes ».
« Amis du Christ » : Benoît XVI en reprend l’idée mais la développe davantage et avec originalité. Il le fit dans une homélie à Saint Pierre, lors de la messe chrismale, qui a lieu le Jeudi Saint 2006.
« Je ne vous appelle plus serviteurs, mais amis » : – « par ces paroles, dit-il, où l’on pourrait même voir l’institution du sacerdoce », « le Seigneur fait de nous ses amis : il nous confie tout ; il nous confie sa personne, afin que nous puissions parler en son nom in persona Christi capitis. Quelle confiance ! Il s’est véritablement remis entre nos mains ».
A- « Il s’est véritablement remis entre nos mains »
Il faut voir ici une allusion claire à l’Eucharistie. Le prêtre est l’homme de l’Eucharistie. L’homme du sacrifice eucharistique. C’est l’idée de l’école française des Berulle, des saint Vincent de Paul, des Saint Jean Eudes qui influença tellement la pensée de Mgr Lefebvre. La finalité sacerdotale est, essentiellement, une finalité « cultuelle ». Le prêtre est l’homme du sacrifice, parce que l’Eucharistie est sacrifice, le sacrifice du Christ. Il est celui qui est choisi pour offrir, in personna Christi capitis, le sacrifice du Christ. « Il s’est véritablement remis entre nos mains » dit le Pape. Et comme le sacrifice du Christ assure à Dieu le Père « tout honneur et toute gloire », le prêtre, à travers cette noble action, poursuit cette mission rédemptrice, salvifique. Il est celui qui, dans le Christ, assure, pour le peuple, le chant de la gloire divine qu’accomplissait le Christ en sa Passion, dans une obéissance parfaite à la volonté de son Père. Le prêtre est donc, dans cette amitié «ontologique», l’homme de la liturgie. Il imite, pour le peuple, au nom du peuple, la liturgie céleste que Saint Jean nous fait connaître dans son Apocalypse. Et sous ce rapport, le prêtre est essentiellement l’homme de la prière parce que le Sacrifice du Christ fut la plus belle des prières. Et l’on comprend pourquoi le pape insiste tant, dans ses livres, sur la liturgie et sa nécessaire restauration. Il faut restaurer la finalité cultuelle du rite de la sainte Messe, par le retour de la piété et de l’adoration. Adoration: telle est la prière céleste.
B-Il invoque le témoignage du Saint Curé d’Ars :
C’est le témoignage que nous donna le Saint Curé d’Ars, nous dit le pape.
« Cette éducation des fidèles à la présence eucharistique … revêtait une efficacité toute particulière, quand les fidèles le voyaient célébrer le saint sacrifice de la Messe. Ceux qui y assistaient disaient « qu’il n’était pas possible de voir un visage qui exprime à ce point l’adoration… Il contemplait l’Hostie avec tant d’amour ». « Toutes les bonnes œuvres réunies – disait-il – n’équivalent pas au sacrifice de la messe, parce qu’elles sont les œuvres des hommes, et la sainte messe est l’œuvre de Dieu ». Il était convaincu que toute la ferveur de la vie d’un prêtre dépendait de la Messe : « La cause du relâchement du prêtre, c’est qu’on ne fait pas attention à la messe ! Hélas ! Mon Dieu ! Qu’un prêtre est à plaindre quand il fait cela comme une chose ordinaire ! Et il avait pris l’habitude, quand il célébrait, d’offrir toujours le sacrifice de sa propre vie : « Oh ! Qu’un prêtre fait bien de s’offrir à Dieu en sacrifice tous les matins ».
C- C’est l’enseignement du pape à la place des Invalides à Paris en 2008
Comme le pape Benoît XVI s’exprimait avec foi, tendresse et émotion, lorsque sur la place des Invalides à Paris devant une multitude de jeunes, il parla du sacerdoce le mettant promptement en relation avec le sacrifice eucharistique : « Comment parvenir à Dieu, disait-il ? Comment parvenir à trouver ou retrouver Celui que l’homme cherche au plus profond de lui-même, tout en l’oubliant si souvent ? Saint Paul nous demande de faire usage non seulement de notre raison, mais surtout de notre foi pour le découvrir. Or, que nous dit la foi? Le pain que nous rompons est communion au Corps du Christ ; la coupe d’action de grâce que nous bénissons est communion au Sang du Christ. Révélation extraordinaire, qui nous vient du Christ et qui nous est transmise par les Apôtres et par toute l’Église depuis deux millénaires : le Christ a institué le sacrement de l’Eucharistie au soir du Jeudi Saint. Il a voulu que son sacrifice soit de nouveau présenté, de manière non sanglante, chaque fois qu’un prêtre redit les paroles de la consécration sur le pain et le vin. Des millions de fois, depuis deux mille ans, dans la plus humble des chapelles comme dans la plus grandiose des basiliques ou des cathédrales, le Seigneur ressuscité s’est donné à son peuple, devenant ainsi, selon la formule de saint Augustin, « plus intime à nous-mêmes que nous-mêmes » (cf. Confessions III, 6. 11).
Frères et sœurs, entourons de la plus grande vénération le sacrement du Corps et du Sang du Seigneur, le Très Saint-Sacrement de la présence réelle du Seigneur à son Église et à toute l’humanité. Ne négligeons rien pour lui manifester notre respect et notre amour ! Donnons-lui les plus grandes marques d’honneur ! Par nos paroles, nos silences et nos gestes, n’acceptons jamais de laisser s’affadir en nous et autour de nous la foi dans le Christ ressuscité présent dans l’Eucharistie ! Comme le dit magnifiquement saint Jean Chrysostome lui-même : « Passons en revue les ineffables bienfaits de Dieu et tous les biens dont il nous fait jouir, lorsque nous lui offrons cette coupe, lorsque nous communions, lui rendant grâce d’avoir délivré le genre humain de l’erreur, d’avoir rapproché de lui ceux qui en étaient éloignés, d’avoir fait, des désespérés, et des athées de ce monde, un peuple de frères, de cohéritiers du Fils de Dieu » (Homélie 24 sur la Première Lettre aux Corinthiens, 1). En effet, poursuit-il, « ce qui est dans la coupe, c’est précisément ce qui a coulé de son côté, et c’est à cela que nous participons » (ibid.). Il n’y a pas seulement participation et partage, il y a «union», dit-il.
La Messe est le sacrifice d’action de grâce par excellence, celui qui nous permet d’unir notre propre action de grâce à celle du Sauveur, le Fils éternel du Père. En elle-même, la Messe nous invite aussi à fuir les idoles, car, saint Paul insiste, « vous ne pouvez pas en même temps prendre part à la table du Seigneur et à celle des esprits mauvais » (1 Co 10, 21). La Messe nous invite à discerner ce qui, en nous, obéit à l’Esprit de Dieu et ce qui, en nous, reste à l’écoute de l’esprit du mal. Dans la Messe, nous ne voulons appartenir qu’au Christ et nous reprenons avec gratitude le cri du psalmiste : « Comment rendrai-je au Seigneur tout le bien qu’Il m’a fait ? » (Ps 115, 12). Oui, comment rendre grâce au Seigneur pour la vie qu’Il nous a donnée ? Là encore, la réponse à la question du psalmiste se trouve dans le psaume lui-même, car la Parole de Dieu répond miséricordieusement elle-même aux questions qu’elle pose. Comment rendre grâce au Seigneur pour tout le bien qu’il nous fait sinon en se conformant à ses propres paroles : « J’élèverai la coupe du salut, j’invoquerai le nom du Seigneur » (Ps 115,13) ?
… Chaque fois qu’une Messe est célébrée, chaque fois que le Christ se rend sacramentellement présent dans son Église, c’est l’œuvre de notre salut qui s’accomplit. Célébrer l’Eucharistie signifie reconnaître que Dieu seul est en mesure de nous offrir le bonheur en plénitude, de nous enseigner les vraies valeurs, les valeurs éternelles qui ne connaîtront jamais de couchant. Dieu est présent sur l’autel, mais il est aussi présent sur l’autel de notre cœur lorsque, en communiant, nous le recevons dans le Sacrement eucharistique….
Or, chers frères et sœurs, qui peut élever la coupe du salut et invoquer le nom du Seigneur au nom du peuple de Dieu tout entier, sinon le prêtre ordonné dans ce but par l’Évêque ? Ici, chers fidèles de Paris et de la région parisienne, mais aussi vous tous qui êtes venus de la France entière et d’autres pays limitrophes, permettez-moi de lancer un appel confiant en la foi et en la générosité des jeunes qui se posent la question de la vocation religieuse ou sacerdotale : n’ayez pas peur ! N’ayez pas peur de donner votre vie au Christ ! Rien ne remplacera jamais le ministère des prêtres au cœur de l’Église ! Rien ne remplacera jamais une Messe pour le Salut du monde ! Chers jeunes ou moins jeunes qui m’écoutez, ne laissez pas l’appel du Christ sans réponse. Saint Jean Chrysostome, dans son Traité sur le sacerdoce, a montré combien la réponse de l’homme pouvait être lente à venir, cependant il est l’exemple vivant de l’action de Dieu au cœur d’une liberté humaine qui se laisse façonner par sa grâce. »
D-« Oh ! Qu’un prêtre fait bien de s’offrir à Dieu en sacrifice tous les matins », avons-nous dit plus haut citant le Curé d’Ars
Il faudrait ici évoquer la merveilleuse encyclique de Pie XII «Mediator Dei» où le pape développe longuement et merveilleusement cette idée du don de soi-même en union à l’offrande du Christ. Nul doute que la pratique des conseils évangéliques – pauvreté, obéissance, chasteté – adaptée au monde clérical ne peut qu’y contribuer grandement. Benoît XVI en parle longuement dans sa lettre d’induction de l’année sacerdotale au sujet du saint Curé d’Ars. Il parle aussi de saint Paul. Il écrit : « L’Année paulinienne qui arrive à sa fin nous invite à considérer encore la figure de l’Apôtre des Gentils dans laquelle brille à nos yeux un modèle splendide de prêtre complètement « donné » à son ministère. « L’amour du Christ nous presse – écrivait-il – et il ajoutait : « Il est mort pour tous, afin que les vivants ne vivent plus pour eux-mêmes, mais pour celui qui est mort et ressuscité pour eux » (2 Co 5, 15). Quel meilleur programme pourrait être proposé à un prêtre qui s’efforce de progresser sur le chemin de la perfection chrétienne ? »
E-Et le pape fonde aussi cette idée du prêtre, l’homme du sacrifice, sur la cérémonie même de l’ordination sacerdotale.
Il y a « la remise du calice ». Là, le Christ « nous transmet son mystère le plus profond et personnel » dit-il. O que cette phrase est belle et profonde. Le Christ nous transmet « son mystère le plus profond et personnel ».
Mais quel est le mystère qu’il nous transmet?
C’est celui de l’amour de Dieu exprimé dans le don du Fils, dans le mystère de l’Incarnation.
Ecoutez cette phrase vibrante de Benoît XVI essayant, dans la Basilique saint Pierre de Rome, le 19 juin 2009, le jour même de l’ouverture de l’année sacerdotal, en la fête du Sacré Cœur de Jésus, dans son homélie, de nous faire comprendre un peu de ce mystère de Dieu :
« Le cœur de Dieu frémit de compassion! Aujourd’hui, en la solennité du Très Saint Cœur de Jésus, l’Eglise offre à notre contemplation ce mystère, le mystère du cœur d’un Dieu qui s’émeut et reverse tout son amour sur l’humanité. Un amour mystérieux, qui dans les textes du Nouveau Testament, nous est révélé comme une passion incommensurable de Dieu pour l’homme. Il ne se rend pas face à l’ingratitude et pas même devant le refus du peuple qu’il a choisi; au contraire, avec une infinie miséricorde, il envoie dans le monde son Fils unique afin qu’il prenne sur lui le destin de l’amour détruit; afin que, vainquant le pouvoir du mal et de la mort, il puisse rendre la dignité de fils aux êtres humains devenus esclaves par le péché. Tout cela a un prix élevé: le Fils unique du Père s’immole sur la croix: « Ayant aimé les siens qui étaient dans le monde, il les aima jusqu’à la fin » (cf. Jn 13, 1). Le symbole de cet amour qui va au-delà de la mort est son côté transpercé par une lance. A cet égard, le témoin oculaire, l’apôtre Jean, affirme: « L’un des soldats, de sa lance, lui perça le côté et il sortit aussitôt du sang et de l’eau » (cf. Jn 19, 34). (Homélie du 19 juin 2009)
Ainsi, le prêtre est l’homme du mystère de l’amour de Dieu qui s’exprime dans le sacrifice du Fils de Dieu. Il est l’homme du mystère sacrificiel. Et c’est ainsi que le prêtre poursuit l’œuvre de son Maître. Il n’est pas d’abord le gardien d’une civilisation terrestre ni l’agent d’une révolution sociale. Il n’a même pas pour premier but de transformer les mœurs et encore moins d’assurer le bonheur en ce monde de ses contemporains. Toute sa vocation, toute sa mission est le sacrifice du Christ, et donc toute sa mission est de sauver les hommes, non point de quelque manière que ce soit et, si l’on peut dire, à sa fantaisie, mais en les acheminant vers la connaissance de la vérité religieuse essentielle qui est Dieu et sa volonté salvifique dans le sacrifice de son Fils. Saint Paul résume aussi clairement que possible la vraie conception du sacerdoce en écrivant à Timothée, son « fils », son « ami de cœur » : « Notre Sauveur Dieu veut que tous les hommes soient sauvés et viennent à la connaissance de la vérité. Car il n’y a qu’un seul Dieu, un seul médiateur aussi de Dieu et des hommes : le Christ Jésus, qui s’est donné lui-même en rançon pour tous ; ce témoignage ‘fut rendu’ en son temps, pour lequel j’ai été établi héraut et apôtre…, docteur des Nations dans la foi et la vérité » (1 Tim 2 3-7). Ainsi le prêtre ne doit avoir qu’une science, celle de Jésus-Christ et du Christ rédempteur. Voilà la pureté et la valeur de son sacerdoce. Le prêtre du Dieu Sauveur n’apporte pas aux hommes une panacée de leurs maux physiques et sociaux, ce qui serait une contradiction radicale avec la charte des Béatitudes évangéliques, mais le salut de leur âme, l’accès du Royaume de Dieu. Le prêtre est prêtre d’un Dieu Sauveur. C’est le grand « Mystère », le Mystère de la foi. Aussi en doit-il scruter les raisons, expliquer les effets, définir l’étendue. Le prêtre est donc l’homme de cette sotériologie universelle dans et par le Christ et son sacrifice. Tel est « sa vie ». Tel est l’objet unique de sa prédication. Et là, de cette manière, le prêtre est fidèle à son Seigneur et Maître, qui veut être « son ami ». Il doit « prêcher le mystère du Christ, mystère sotériologique, tenu caché aux siècles et aux générations, mais qui vient d’être révélé à ses Saints », dit saint Paul. « Le prêtre doit prêcher la richesse et la gloire de ce mystère qui n’est autre que le Christ en nous l’espérance de la gloire ». En nous « donnant son sacrifice », en nous remettant « le livre de sa parole qu’il nous confie », ce qui se fait lors de la cérémonie d’ordination, en nous donnant le pouvoir d’absolution « qui nous fait participer à sa conscience de la misère du péché et de toute l’obscurité du monde », « il nous donne, dit merveilleusement le pape, dans les mains la clé pour rouvrir la porte vers la maison du Père ». Le prêtre est donc celui qui donne le bonheur du Ciel. Mais attention ! Le bonheur du Ciel ! Oui Mais il est un moyen essentiel, hors pair, qui est au centre de ce don, et vers lequel tout converge, c’est le Christ Jésus. Il s’agit de la personne même du Seigneur, de son avènement sur terre et de son rôle salutaire. Le prêtre est bien celui qui donne le bonheur du Ciel, mais en prêchant le Christ et son Evangile. Si le prêtre est tel, c’est d’abord parce que « le Christ est en nous l’espérance de la gloire ». Et cette « gloire » nous la possédons dans le sacrifice du Christ-Sauveur. C’est son être. C’est sa mission. Son service. Son service ecclésial.
C’est pourquoi ne mettons pas d’opposition, dit le pape, entre la « conception socio-fonctionnelle définissant l’essence du sacerdoce avec le concept de « service »: le service à la communauté, dans l’exercice d’une fonction… dans le primat de la parole et du service de l’annonce » et la « la conception sacramentelle-ontologique, du sacerdoce, lié au primat de l’Eucharistie, lié au « binôme « sacerdoce-sacrifice » »
Puisque, comme le dit le Concile Vatican II, cité, ici, par le pape, dans le décret Presbyterorum ordinis du Concile Vatican II, il affirme, à juste titre: « En effet, l’annonce apostolique de l’Evangile convoque et rassemble le peuple de Dieu, (au pied de l’autel) afin que tous les membres de ce peuple… s’offrent eux-mêmes en « victime vivante, sainte, agréable à Dieu » (Rm 12, 1) et c’est précisément à travers le ministère des prêtres que le sacrifice spirituel des fidèles atteint à sa perfection dans l’union au sacrifice du Christ, unique Médiateur. En effet ce sacrifice est offert par les mains des prêtres au nom de toute l’Eglise dans l’Eucharistie « de manière non sanglante et sacramentelle, jusqu’à ce que vienne le Seigneur lui-même » (n. 2).
Mais n’oublions pas non plus, dit le pape, que : le prêtre n’est pas le « maître » de la parole, mais il en est le serviteur. Il n’est pas la parole mais, comme le proclamait Jean le Baptiste…, il est la « voix » de la Parole: « Voix de celui qui crie dans le désert: préparez le chemin du Seigneur, rendez droits ses sentiers » (Mc 1, 3). (Audience générale du 24 juin 2009)
Mais attention, nous prévient le pape, dans son discours du 24 juin 2009, lors de l’audience général du mercredi : « être « voix » de la Parole, ne constitue pas pour le prêtre un simple aspect fonctionnel. Au contraire, cela présuppose une substantielle « perte de soi » dans le Christ, en participant à son mystère de mort et de résurrection avec tout son moi: intelligence, liberté, volonté et offrande de son propre corps, comme sacrifice vivant (cf. Rm 12, 1-2). Seule la participation au sacrifice du Christ, à sa khènosi, rend l’annonce authentique! Tel est le chemin qu’il doit parcourir avec le Christ pour parvenir à dire au Père avec Lui: que s’accomplisse « non ce que je veux, mais ce que tu veux » (Mc 14, 36). L’annonce, alors, comporte toujours également le sacrifice de soi, condition pour que l’annonce soit authentique et efficace ». (Discours du 24 juin 2009)
C’est alors que nos trouvons sous la plume du pape, la définition très classique du prêtre comme « Alter Christus ». (un autre Christ).Il nous en donne une définition merveilleuse :
« Alter Christus, le prêtre est profondément uni au Verbe du Père, qui en s’incarnant a pris la forme d’un serviteur, est devenu serviteur (Cf. Ph 2, 5-11). Le prêtre est le serviteur du Christ, au sens que son existence, configurée à Lui de manière ontologique, assume un caractère essentiellement relationnel: il est en le Christ, pour le Christ et avec le Christ au service des hommes. Précisément parce qu’il appartient au Christ, le prêtre est radicalement au service des hommes: il est ministre de leur salut, de leur bonheur, de leur libération authentique » « Discours du 24 juin 2009)
F-«Le prêtre est ministre de leur salut, de leur bonheur, de leur libération authentique » parce que, comme ami, « Le Christ nous met dans les mains la clé pour rouvrir la porte vers la maison du Père »
C’est dire équivalemment que « le prêtre est l’homme de l’avenir ».
Le pape exprime cette vérité dans un message enregistré pour une retraite sacerdotale internationale, le 28 septembre 2009. Il dit : « Le prêtre est l’homme de l’avenir : …Ce qu’il fait sur terre est de l’ordre des moyens ordonnés à la Fin ultime. La messe est ce point unique de jonction entre les moyens et la Fin, puisqu’elle nous donne déjà de contempler, sous l’humble apparence du pain et du vin, le Corps et le Sang de Celui que nous adorerons dans l’éternité. Les phrases simples et denses du saint Curé sur l’Eucharistie nous aident à mieux percevoir la richesse de ce moment unique de la journée où nous vivons un face à face vivifiant pour nous-mêmes et pour chacun des fidèles ». « On ne comprendra, écrivait-il, le bonheur qu’il y a de dire la messe que dans le ciel ! ». « C’est pourquoi je vous encourage à fortifier votre foi et celles des fidèles dans le Sacrement que vous célébrez et qui est la source de la vraie joie. Le saint d’Ars s’écriait : « Le prêtre doit avoir la même joie (que les apôtres) en voyant Notre Seigneur qu’il tient entre ses mains ».
G- Sur ce point encore, le témoignage et l’exemple du Curé d’Ars sont fort intéressants
Et ainsi de cette magnifique vocation sacerdotale, celle d’être « amis du Christ », celle d’être un « don immense » pour le peuple, celle d’être « pourvoyeur d’espérance », dans la célébration du sacrifice, et dans sa prédication, le saint Curé d’Ars nous en donna et l’enseignement et l’exemple.
Le Curé d’Ars disait, c’est cité par le Pape, dans sa lettre pour l’indiction de l’année sacerdotale : « Un bon pasteur, un pasteur selon le cœur de Dieu, c’est là le plus grand trésor que le bon Dieu puisse accorder à une paroisse, et un des plus précieux dons de la miséricorde divine ». Il parlait du sacerdoce comme s’il ne réussissait pas à se convaincre de la grandeur du don et de la tâche confiés à une créature humaine : « Oh ! que le prêtre est quelque chose de grand ! s’il se comprenait, il mourrait… Dieu lui obéit : il dit deux mots et Notre Seigneur descend du ciel à sa voix et se renferme dans une petite hostie… ». Et, pour expliquer à ses fidèles l’importance des sacrements, il disait : « Si nous n’avions pas le sacrement de l’Ordre, nous n’aurions pas Notre Seigneur. Qui est-ce qui l’a mis là, dans le tabernacle ? Le prêtre. Qui est-ce qui a reçu notre âme à son entrée dans la vie ? Le prêtre. Qui la nourrit pour lui donner la force de faire son pèlerinage ? Le prêtre. Qui la préparera à paraître devant Dieu, en lavant cette âme pour la dernière fois dans le sang de Jésus-Christ ? Le prêtre, toujours le prêtre. Et si cette âme vient à mourir [à cause du péché], qui la ressuscitera, qui lui rendra le calme et la paix ? Encore le prêtre… Après Dieu, le prêtre c’est tout… Le prêtre ne se comprendra bien que dans le ciel ».
Ces affirmations, jaillies du cœur sacerdotal du saint curé, dit le Pape, peuvent nous sembler excessives. Elles manifestent toutefois en quelle haute considération il tenait le sacrement du sacerdoce. Il semblait submergé par le sentiment d’une responsabilité sans bornes : « Si l’on comprenait bien le prêtre sur la terre, on mourrait non de frayeur, mais d’amour … Sans le prêtre, la mort et la passion de Notre Seigneur ne serviraient de rien… C’est le prêtre qui continue l’œuvre de Rédemption, sur la terre… A quoi servirait une maison remplie d’or, si vous n’aviez personne pour ouvrir la porte ? Le prêtre a la clef des trésors célestes : c’est lui qui ouvre la porte ; il est l’économe du bon Dieu, l’administrateur de ses biens…. Laissez une paroisse vingt ans sans prêtre : on y adorera les bêtes… Le prêtre n’est pas prêtre pour lui… il est pour vous ».
« Chers frères dans le Sacerdoce, demandons au Seigneur Jésus la grâce d’aimer notre sacerdoce »
N’oublions pas le sens profonde du prêtre : « devenir ami de Jésus Christ » : « Le Seigneur fait de nous ses amis : il nous confie tout ; il nous confie sa personne, afin que nous puissions parler en son nom in persona Christi capitis. Quelle confiance !
Et cette amitié est tellement importante, – elle est même de l’essence du prêtre -, que « nous devons nous engager chaque jour à nouveau pour cette amitié ».
H- « S’engager chaque jour à nouveau pour cette amitié » ! Qu’est-ce à dire ?
« Amitié signifie communion, nous explique le Pape, dans la pensée et la volonté. C’est ce que nous dit saint Paul : aux Philippines « Nous devons nous exercer à cette communion de pensée avec Jésus » : « Ayez en vous les mêmes sentiments dont était animés le Christ Jésus ».
« Et cette communion de pensée n’est pas une chose purement intellectuelle, mais c’est une communion des sentiments et de la volonté, et donc également de l’action ». Cela signifie – et ici le Pape reprend tout l’enseignement de ses prédécesseurs sur les moyens de sanctification du prêtre – cela signifie que le prêtre doit « connaître Jésus de façon toujours plus personnelle en l’écoutant, en vivant avec Lui, en s’arrêtant auprès de Lui. L’écouter, dans la lectio divina, c’est-à-dire en lisant l’Ecriture Sainte non pas de façon académique, mais spirituelle »; ainsi, il apprend « à rencontrer Jésus présent qui nous parle ». Le prêtre ainsi doit « raisonner et réfléchir sur ses paroles et sur son action devant Lui et avec Lui. La lecture de l’Ecriture Sainte est prière, elle doit être prière, elle doit naître de la prière et conduire à la prière. Les évangélistes nous disent que le Seigneur, à plusieurs reprises, des nuits entières se retirait « sur la montagne » pour prier seul ». Le prêtre a besoin de cette « montagne » : c’est le sommet intérieur qu’il doit gravir, la montagne de la prière »
Le pape se fait ici très absolu : « Ce n’est qu’ainsi que se développe l’amitié. Ce n’est qu’ainsi que le prêtre peut « accomplir son service sacerdotal ». Ce n’est qu’ainsi que le prêtre peut « apporter le Christ et son Evangile aux hommes ». « L’action extérieure, en fin de compte, reste sans fruits et perd de son efficacité si elle ne naît pas de la communion intime avec le Christ. Le temps que le prêtre passe pour cela est véritablement un temps d’activité pastorale, d’une activité authentiquement pastorale. Le prêtre doit être surtout un homme de prière. Le monde dans son activité frénétique perd souvent le sens de l’orientation vers Dieu. La prière la lui redonnera ». Voyez l’impact des monastères bénédictins !
« Etre ami de Jésus, être prêtre signifie être un homme de prière ». « C’est ainsi que nous reconnaissons le Christ et que nous sortons de l’ignorance des simples serviteurs. C’est ainsi que nous apprenons à vivre, à souffrir et agir avec Lui et pour Lui ».
I- « Une amitié avec les siens »
Mais plus encore, l’amitié avec Jésus est par antonomase toujours « une amitié avec les siens ». « Ainsi le prêtre ne peut être amis de Jésus que dans la communion avec le Christ tout entier, avec la tête et le corps; dans la vigne abondante de l’Eglise animée par son Seigneur ». Et c’est pourquoi Benoît XVI insiste beaucoup sur le sacerdoce accomplissant sa mission en « Eglise ». Il insiste sur la dimension « ecclésiale » du sacerdoce. Il le disait particulièrement alors qu’il annonçait aux membres de la Congrégation du Clergé réunis en assemblée plénière, cette année sacerdotale : « La mission du prêtre se déroule « dans l’Eglise ». « Une telle dimension ecclésiale, de communion, hiérarchique et doctrinale est absolument indispensable pour toute mission authentique, et en garantit seule l’efficacité spirituelle ». Il insistait : « la mission est « ecclésiale » car personne n’annonce ni n’apporte soi-même, mais dans et à travers son humanité, chaque prêtre doit être bien conscient d’apporter un Autre, le Christ,Dieu lui-même, au monde ».
Et cela a des implications extraordinaires touchant l’objet de la prédication sacerdotale. L’enseignement du prêtre c’est l’enseignement de l’Eglise. Car c’est l’Eglise qui a la garde de la vérité révélée, du « mystère de la foi ». Sa mission est de la conserver sans défaillance, intégralement, à l’instar d’une colonne robuste et d’un mur de soutènement, image qui évoque la droiture et la stabilité de cette conservation, défiant toute atteinte des pressions adverses. Comme Pierre était destiné à être le rocher inébranlable sur lequel repose l’Eglise de Jésus-Christ, les évêques et les prêtres sont comme les murs de cet édifice. De même que l’ancien Temple, maison de Dieu, contenait l’Arche d’Alliance et le propitiatoire, l’Eglise continue l’incarnation du Verbe médiateur. Comme le dit Saint Paul, la sagesse divine « s’est révélée dans le Christ par l’Evangile et par l’Eglise » (Eph 3 6, 10). C’est donc l’Eglise qui a la garde de l’Evangile, de l’annonce de la Bonne Nouvelle, de Dieu voulant sauver tous les hommes. L’Eglise continue cette révélation ; elle est le lieu permanent de cette activité salutaire. Elle contient le « mystère du salut ». Elle a la charge de sa divulgation. Le prêtre y doit rester fidèle. C’est là son bien et sa gloire. Le pape y insiste. Il dit : « En tant qu’Eglise et en tant que prêtres, nous annonçons Jésus de Nazareth notre Seigneur et Christ, crucifié et ressuscité, Souverain du temps et de l’histoire dans l’heureuse certitude que cette vérité coïncide avec les attentes les plus profondes du cœur humain. Dans le mystère de l’incarnation du Verbe, c’est-à-dire dans le fait que Dieu s’est fait homme comme nous, réside aussi bien le contenu que la méthode de l’annonce chrétienne ».
« Le contenu de l’annonce chrétienne »! A savoir l’objet de la prédication.
« La méthode », à savoir enseigner avec humilité et assurance.
« La mission trouve ici son véritable moteur : dans Jésus Christ, précisément. Le caractère central du Christ porte en lui la juste valorisation du sacerdoce ministériel, sans lequel il n’y aurait ni l’Eucharistie, ni encore moins la mission ou l’Eglise elle-même ».
Là, le pape rappelle une vérité essentielle que Mgr Nourrichard, l’évêque d’Evreux, devrait méditer : « Dans ce sens, il est nécessaire de veiller afin que les « nouvelles structures » ou organisations pastorales ne soient pas pensées pour une époque où l’on devrait « se passer » du ministère ordonné, en partant d’une interprétation erronée de la juste promotion des laïcs, car dans ce cas, on poserait les conditions pour une dilution supplémentaire du sacerdoce ministériel et les éventuelles « solutions » présumées coïncideraient de façon dramatique avec les causes réelles des problématiques contemporaines liées au ministère ». C’est là une belle sagesse. Autrement dit, n’oubliez pas que l’Eglise catholique est fondée sur le sacerdoce ministériel et pas d’abord sur le peuple de Dieu, sur le sacerdoce commun des fidèles.
La « collaboration que l’on doit ouvrir toujours davantage aux fidèles laïcs »,
Toutefois il ne faut pas oublier qu’est heureuse la bonne collaboration des prêtres et des laïcs. Le pape le rappelle dans sa lettre d’indiction de l’année sacerdotale : « N’oublions pas la « collaboration que l’on doit ouvrir toujours davantage aux fidèles laïcs, avec lesquels les prêtres forment l’unique peuple sacerdotal et au milieu desquels, en raison du sacerdoce ministériel, ils se trouvent « pour les conduire tous à l’unité dans l’amour « s’aimant les uns les autres d’un amour fraternel, rivalisant d’égards entre eux » (Rm 12, 10) ». Il convient de se souvenir, dans ce contexte, comment le Concile Vatican II encourageait chaleureusement les prêtres à « reconnaître sincèrement et à promouvoir la dignité des laïcs et la part propre qu’ils prennent dans la mission de l’Église… Ils doivent écouter de bon cœur les laïcs, en prenant fraternellement en considération leurs désirs, et en reconnaissant leur expérience et leur compétence dans les divers domaines de l’activité humaine, afin de pouvoir discerner avec eux les signes des temps ».
J- Le mystère du Christ, « contenu et méthode de l’annonce chrétienne »
Voilà ce que cherchent les hommes. « Dieu est l’unique richesse, dit le Pape, que, en définitive, les hommes désirent trouver dans un prêtre ». Cette richesse est la possession de l’Eglise. Le prêtre, par fidélité et amour de son Christ, doit la diffuser, ce qui montre « l’importance de la discipline (le terme est lié à celui de « disciple ») ecclésiastique et de la formation doctrinale, et non seulement théologique, initiale et permanente », mais aussi affective.
K- La formation des séminaristes.
Et c’est pourquoi le pape insiste sur l’importance de la formation des séminaristes. Il faut former le Christ dans les jeunes lévites avec l’amour de la vérité du Christ et de l’Eglise avec l’amour de la liturgie romaine en raison de la finalité cultuelle du sacerdoce. Il faut « soigner la formation des candidats au ministère », leur donner « une formation correcte, développée en communion avec la Tradition ecclésiale ininterrompue, sans césure ni tentation de discontinuité. Dans ce sens, il est important de favoriser chez les prêtres, en particulier chez les jeunes générations, un accueil correct des textes du Concile œcuménique Vatican II, interprétés à la lumière de tout le bagage doctrinal de l’Eglise. – Faut-il encore pour certains qu’ils le soient !-. « Il apparaît également urgent de récupérer la conscience qui pousse les prêtres à être présents, identifiables et reconnaissables tant à travers leur jugement de foi, qu’à travers les vertus personnelles ou encore l’habit, dans les domaines de la culture et de la charité, depuis toujours au cœur de la mission de l’Eglise ».
L-Le prêtre et le monde
Fort de cette amitié du Christ, de cette identification chaque jour plus grand entre le Christ et son prêtre, le prêtre est en mesure de porter le Christ au monde. Il est la réponse véridique à la quête du vrai qui anime le cœur de tout homme.
Mais ne nous troublons pas, dit le pape, notre temps n’est pas pire que celui du Curé d’Ars.
Ici, le pape en fait la description. Il dit que le temps du Curé d’Ars était dominé par le rationalisme, « qui était en réalité loin de satisfaire les authentiques besoins de l’homme et qui, en définitive, n’était pas vivable » (Audience générale du 6 Août 2009). Notre temps est dominé par un total relativisme qui, tout également, ne peut apaiser la soif d’absolu au cœur de tout homme. Le prêtre et son ministère, l’Eglise et son message de la bonne Nouvelle sont la réponse adéquate de l’angoisse humaine.
« Chers frères et sœurs, à 150 ans de la mort du saint curé d’Ars, les défis de la société d’aujourd’hui ne sont pas moins difficiles, ils sont même devenus peut-être plus complexes. Si à l’époque régnait la « dictature du rationalisme », à l’époque actuelle, on note dans de nombreux milieux, une sorte de « dictature du relativisme ». Elles apparaissent toutes deux comme des réponses inadaptées au juste besoin de l’homme d’utiliser pleinement sa propre raison comme élément distinctif et constitutif de son identité. Le rationalisme fut inadapté parce qu’il ne tint pas compte des limites humaines et prétendit élever la seule raison comme mesure de toute chose, en la transformant en déesse; le relativisme contemporain mortifie la raison, parce que, de fait, il en vient à affirmer que l’être humain ne peut rien connaître avec certitude au-delà du domaine scientifique positif. Mais aujourd’hui, comme alors, l’homme « assoiffé de signification et d’accomplissement » va à la recherche constante de réponses exhaustives aux questions de fond qu’il ne cesse de se poser ».
Et bien pour répondre à cette quête de Dieu, « le prêtre doit placer une union personnelle intime avec le Christ, qu’il faut cultiver et accroître jour après jour. C’est seulement s’il est amoureux du Christ que le prêtre pourra enseigner à tous cette union, cette amitié intime avec le divin Maître, qu’il pourra toucher les cœurs des personnes et les ouvrir à l’amour miséricordieux du Seigneur. C’est seulement ainsi, par conséquent, qu’il pourra transmettre enthousiasme et vitalité spirituelle aux communautés que le Seigneur lui confie » et lutter et contre le rationalisme et le relativisme. (Audience générale du 6 août 2009)
M-La dévotion mariale.
Et je terminerai par une idée qui tient beaucoup au Souverain Pontife, la dévotion du prêtre à Marie. Il en parle plusieurs fois dans son enseignement. Dans sa lettre d’indiction à l’année sacerdotale, il écrit : « Chers prêtres, la célébration du 150e anniversaire de la mort de saint Jean-Marie Vianney (1859) vient immédiatement après les célébrations achevées il y a peu du 150e anniversaire des apparitions de Lourdes (1858). Déjà en 1959, le bienheureux Pape Jean XXIII l’avait remarqué : « Peu avant que le Curé d’Ars n’achevât sa longue carrière pleine de mérites, [la Vierge Immaculée] était apparue dans une autre région de France à une enfant humble et pure pour lui communiquer un message de prière et de pénitence, dont on sait l’immense retentissement spirituel depuis un siècle. En vérité, l’existence du saint prêtre dont nous célébrons la mémoire, était à l’avance une vivante illustration des grandes vérités surnaturelles enseignées à la voyante de Massabielle ! Il avait lui-même pour l’Immaculée Conception de la Très Sainte Vierge une très vive dévotion, lui qui, en 1836, avait consacré sa paroisse à Marie conçue sans péché et devait accueillir avec tant de foi et de joie la définition dogmatique de 1854 ». Le Saint Curé rappelait toujours à ses fidèles que « Jésus-Christ, après nous avoir donné tout ce qu’il pouvait nous donner, veut encore nous faire héritiers de ce qu’il y a de plus précieux, c’est-à-dire sa Sainte Mère ».
Dans son discours de l’audience générale du 12 août 2009, il cherche à établir le fondement de cette dévotion. Il veut établir le « lien entre la Vierge et le sacerdoce ». « Il s’agit d’un lien profondément enraciné dans le mystère de l’Incarnation. Lorsque Dieu décida de se faire homme dans son Fils, il avait besoin du « oui » libre de l’une de ses créatures. Dieu n’agit pas contre notre liberté. Et une chose véritablement extraordinaire a lieu: Dieu devient dépendant de la liberté, du « oui » de l’une de ses créatures; il attend ce « oui ». Saint Bernard de Clairvaux, dans l’une de ses homélies, a expliqué de façon dramatique ce moment décisif de l’histoire universelle, où le ciel, la terre et Dieu lui-même attendent ce que dira cette créature ».
Le « oui » de Marie est donc la porte à travers laquelle Dieu a pu entrer dans le monde, se faire homme. Ainsi, Marie participe réellement et profondément au mystère de l’incarnation, de notre salut. Et l’incarnation, le fait que le Fils s’est fait homme, était dès le début finalisée au don de soi; au don de soi avec beaucoup d’amour dans la Croix, pour se faire pain pour la vie du monde. Ainsi, sacrifice, sacerdoce et Incarnation vont de pair et Marie est au centre de ce mystère ».
Puis le pape nous conduit à la Croix et va faire une très belle méditation sur la parole du Christ en Croix s’adressant à Saint Jean : « Voici votre Mère ».
« Allons à présent à la Croix. Avant de mourir, Jésus voit sa Mère au pied de la Croix; et il voit le fils bien-aimé » saint Jean « c’est un exemple, une préfiguration de tous les disciples bien-aimés, de toutes les personnes appelées par le Seigneur à être « le disciple qu’il aimait » et par conséquent, de façon particulière, également des prêtres. Jésus dit à Marie: « Mère, voici ton fils » (Jn 19, 26). Il s’agit d’une sorte de testament: il confie sa Mère au soin du fils, du disciple. Mais il dit également au disciple: « Voici ta mère » (Jn 19, 27). L’Evangile nous dit qu’à partir de ce moment, saint Jean, le fils bien-aimé, accueillit la mère, Marie, « chez lui ». C’est ce que dit la traduction française; mais le texte grec est beaucoup plus profond, beaucoup plus riche. Nous pourrions le traduire de la façon suivante: il prit Marie dans l’intimité de sa vie, de son être, « eis tà ìdia », dans la profondeur de son être. Prendre avec soi Marie, signifie l’introduire dans le dynamisme de son existence tout entière – il ne s’agit pas d’une chose extérieure – et dans tout ce qui constitue l’horizon de son apostolat. Il me semble que l’on comprend donc que le rapport particulier de maternité existant entre Marie et les prêtres constitue la source primaire, le motif fondamental de la prédilection qu’elle nourrit pour chacun d’eux. Marie les aime en effet pour deux raisons: car ils sont davantage semblables à Jésus, amour suprême de son coeur et parce qu’eux aussi, comme Elle, sont engagés dans la mission de proclamer, témoigner et apporter le Christ au monde. – C’est la mission du prêtre – En vertu de son identification et conformation sacramentelle à Jésus, Fils de Dieu et Fils de Marie, chaque prêtre peut et doit se sentir véritablement le fils bien-aimé de cette très noble et très humble Mère ».
« Je confie cette Année sacerdotale à la Vierge Sainte, lui demandant de susciter dans l’âme de chaque prêtre un renouveau généreux de ces idéaux de donation totale au Christ et à l’Église qui ont inspiré la pensée et l’action du Saint Curé d’Ars. La fervente vie de prière et l’amour passionné de Jésus crucifié ont nourri le don quotidien et sans réserve de Jean-Marie Vianney à Dieu et à l’Église ». (le 16 juin 2009)
Avec ma bénédiction.
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