Un président désormais comme un somnambule
publié dans flash infos le 27 mars 2010
Un président désormais comme un somnambule
Ce fut une affaire épineuse pour Isabelle de Gaulmyn. Elle avait à expliquer dans La Croix que l’Eglise ne donne pas de consigne électorale… sauf quand elle en donne. Il lui incombait en effet de décrypter pour ses lecteurs l’intervention publique du président Vingt-Trois juste avant le premier tour des élections régionales :
« Voilà longtemps que les évêques ne donnent plus de consignes de vote », écrivait-elle, « il arrive cependant qu’avant une échéance électorale importante, l’Eglise rappelle les chrétiens à leurs devoirs de citoyens. »
Le président Vingt-Trois, entouré du pasteur Claude Baty et du métropolite orthodoxe Emmanuel, avait tonitrué, selon La Croix, que « les Eglises chrétiennes s’insurgent [pas moins !] contre l’accueil durci des migrants ». Insurrection simplement verbale, mais enfin proclamation réellement insurrectionnelle, réclamant en somme davantage de discrimination positive en faveur des immigrés, ce qui signifie inévitablement davantage de discrimination négative en défaveur des Français à la recherche d’un logement ou d’un emploi. Quand il n’y a plus ni logement ni emploi disponible, le président Vingt-Trois peut toujours « s’insurger ». Ce n’est plus une insurrection, c’est une crise de nerfs.
En réalité le président Vingt-Trois recherche des cautions et appuis extérieurs pour retrouver l’autorité morale qu’il a perdue auprès des catholiques par son scandale des obsèques de Philippe Séguin (Présent du 10 février). Nous le lui répéterons publiquement autant de fois qu’il le faudra :
— Désormais, quand il parle au Souverain Pontife ou à n’importe qui, le président Vingt-Trois sait bien que son interlocuteur pense en silence à l’énorme festival de sacrilèges qu’il a présidé le 11 janvier 2010.
Le métropolite et le pasteur ne lui ont pas suffi, mais déjà il avait programmé le recours au rabbin. Ce fut à Notre-Dame de Paris le désastre du dimanche de la Passion, le 21 mars. Reculant devant la violence surnaturelle du chapelet, le Président dut se réfugier dans la sacristie. Je lui souhaite qu’une telle retraite, s’il l’a vécue avec humilité, lui ait été salutaire.
« Président », il l’est seulement de l’épiscopat français, et seulement parce que les évêques l’ont élu. La présidence d’un épiscopat n’a pas été fondée par Notre-Seigneur, elle ne comporte aucune autorité canonique, elle s’accompagne, selon les circonstances, d’une sorte d’autorité morale qui est fragile et passagère. Il l’a perdue, et il sait pourquoi, la perte est datée : 11 janvier-21 mars 2010.
Mais il avait été « président », aussi, le 11 janvier 2010, puisqu’il présidait une eucharistie. On n’a entendu ni lu nulle part qu’en l’occurrence il aurait célébré le saint sacrifice. C’est la même chose dans les deux formulations, croyez-vous ? Mais alors comment se fait-il que tant de prêtres, aujourd’hui, se reconnaissent entre eux par l’emploi systématique de la première et l’omission systématique de la seconde ?
Son tempérament naturel, qui est autoritaire et rageur, peut l’entraîner à de dangereuses extrémités, comme son sabotage, méthodique et implacable, des claires dispositions décrétées par Benoît XVI pour libérer et honorer la messe traditionnelle. Malgré tout je l’imagine, réfugié dans sa sacristie, pâle comme un somnambule, et gagné par le repentir. Il y aura plus de joie dans le Ciel et sur la terre pour un archevêque qui se repent que pour quatre-vingt-dix-neuf évêques se croyant justifiés par leur invocation routinière et creuse de Vatican II. Mais le président Vingt-Trois ne peut ignorer que le repentir sans réparation serait une impasse.
JEAN MADIRAN