Le 11 février: fête des apparitions de la Bienheureuse Vierge Marie à Lourdes.
publié dans la doctrine catholique le 11 février 2019
A l’occasion de cette fête mariale: les apparitions de ND à Lourdes, le 11 février, je me permets de vous proposer de méditer le commentaire que j’ai donné sur l’hymne des Matine du Bréviaire romain. C’est le chapitre 5 de mon livre: « A la fin mon coeur immaculée triomphera » publié aux éditions de la Délivrande. Vous pouvez le commender cher l’auteur, M l’abbé Paul Aulagnier 42, Avenue de la Marne 03200 Vichy.
L’hymne des Matines
Première strophe
« Te dicimus praeconio, Intacta Mater Numinis, Nostris benigna laudibus Tuam repende gratiam »
« Nous vous célébrons dans nos chants, Immaculée Mère de Dieu ; bienveillante à nos louanges, donnez-nous votre faveur »
« Te dicimus praeconio », « Nous vous célébrons dans nos chants ». Notre auteur exprime la raison de la liturgie, sa finalité. Elle a pour finalité de magnifier, auprès des fidèles, le dogme catholique, ici, en l’occurrence, le dogme marial, et plus particulièrement le dogme de l’Immaculée Conception. Oui ! C’est la grandeur de la Liturgie. Par ses chants, ses hymnes, son art, ses vitraux, ses peintures, ses statuts, son architecture… la Liturgie, qui comprend tout cela et bien plus encore… exprime la doctrine catholique. « Lex credenti, lex orandi ». La foi s’exprime dans la prière. La Liturgie est le « catéchisme » du peuple, elle est le grand enseignement populaire de l’Eglise. C’est ainsi que l’Eglise transmet, au fil des siècles, sa sagesse. Le livre n’est pas le seul moyen de transmettre la science. Heureusement du reste. Le chant, l’architecture, l’art, les fresques, les peintures, les vitraux… sont des moyens bien plus puissants pour transmettre la connaissance des mystères chrétiens. C’est ce que veut dire ici notre auteur : « Nous vous célébrons dans nos chants », « Te dicimus praeconio ». « Dicimus » de « dicere » qui veut dire entre autres, « Raconter, chanter, célébrer » et « praeconium » veut dire : « éloge » « panégyrique ». Je traduirai plus heureusement en m’éloignant un peu du texte latin, mais en en gardant le sens : « Nous chantons vos éloges ». Cela conviendrait parfaitement à la raison de cette hymne qui veut magnifier la Vierge Marie en raison de toutes ses merveilles, de son Immaculée Conception, « Intacta Mater Numinis », « Immaculée Mère de Dieu ». Nous avons trouvé ce même verset dans notre chapitre sur la fête de l’Immaculée Conception, au chapitre 4. Je vous renvoie à mon commentaire.
« Nostris benigna laudibus » « Bienveillante à nos louanges ». J’aime particulièrement ce terme de « bienveillante », en latin « benigna ». C’est un mot très riche que l’on trouve très souvent dans l’Ecriture Sainte.
Que veut-il dire exactement ?
Saint Paul déclare dans son énumération des traits caractéristiques de la charité chrétienne qu’elle est « toute bénignité » (1 Cor 13 4). Le verbe chrèsteuomai qu’il emploie ici n’est pas usité ailleurs dans la Bible, nous explique les exégètes…, mais par contre le substantif et l’adjectif de même racine, chrestos, chrestotes sont courants. Ils veulent dire de « bonne qualité ». Il s’emploie à propos d’un objet dont on peut se servir ou d’une personne qui rend service et impliquent donc une idée d’excellence. Notre Seigneur déclare : « Personne, pendant qu’il boit du vin vieux ne veut du nouveau. Car il dit : le vieux est bon » (Lc 5 39), doux et sucré, par opposition au vin trop jeune, aigre, sur ; et nul ne changera un vin agréable à boire contre du mauvais vin. Le Maître, comparant son enseignement à celui des Pharisiens affirme que son joug est bénin et son fardeau léger (Mt 11 30). Les prescriptions imposées par les Pharisiens sont intolérables, comme des fardeaux lourds et rudes. Au contraire, le joug du Christ n’a rien de blessant ni de rigoureux. Il est chrestos, « bien conditionné, qui n’écorche pas le cou, par conséquent doux au toucher ».
Au sens figuré et appliqué aux personnes, la bénignité fera sur l’esprit et le cœur du prochain une impression comparable à celle que font le miel et le sucre sur le goût, et le français moderne fait de la bénignité une qualité de la bonté, synonyme de douceur et d’humanité, de condescendance. Mais la bénignité n’est pas un simple sentiment intérieur, elle tend à se manifester et à rendre service, elle inclut donc essentiellement la bienfaisance. Saint Thomas d’Aquin la définit excellemment : « un amour intérieur répandant le bien autour d’elle ». Pour en comprendre tout le sens, on s’inspirera volontiers de saint Jérôme qui écrit : « La bénignité ou suavité – le grec chrèstotès a les deux sens – est une vertu douce, caressante, tranquille, disposée à partager tous ses biens ; elle invite à entrer dans sa familiarité ; elle est douce en ses paroles, mesurée en ses mœurs. Bref, les stoïciens la définissent : « une vertu spontanément disposée à la bienfaisance ». La bonté proprement dite n’est pas bien éloignée de la bénignité, car elle aussi est disposée à la bienfaisance. Mais elle en diffère en ceci que la bonté peut être un peu sombre et avoir les sourcils froncés d’une austère moralité, faire le bien sans doute et donner ce qu’on lui demande, mais sans être suave en ses rapports, ni attirer tout le monde par sa douceur » (In Gal, 5 22).
Cela conviendrait mieux à Notre-Dame, et exprimerait parfaitement l’idée que veut exprimer notre auteur au sujet de Marie : puisque la bénignité est la vertu propre de l’hospitalité, elle inspire le bon accueil, agréable et secourable au prochain. Ainsi de Notre-Dame. On peut la supplier. Elle écoutera nos suppliques et « donnera ses faveurs » « Tuam repende gratiam ».
Deuxième strophe
« Sontes Adami posteri, Infecta proles gignimur ; labis paternae nescia Tu sola, Virgo, crederis »
« Coupable postérité d’Adam, nous naissons enfants de corruption ; nous croyons que vous seule, Ô Vierge, ignorez la tâche héréditaire ».
Ô quelle magnifique affirmation de la foi sur le péché originel et ses conséquences, exprimée en cette sentence si brève. On pourrait la résumer en disant : tous, nous avons péché en Adam, seule la Vierge Marie, de cette tâche originelle et « héréditaire », est exempte.
C’est, nous avons eu l’occasion de le dire déjà au chapitre 4, l’enseignement du Concile de Trente. Les chapitres de la 5ème session du Concile de Trente l’enseignent clairement.
Comme ce dogme du péché originel est confessé aujourd’hui avec bien des faiblesses ̶ pour ne pas dire plus enseigné du tout – je me permets, amis lecteurs, de vous redonner cet enseignement.
Cinquième session, 17 juin 1546 : décret sur le péché originel.
1510 … le saint concile œcuménique et général de Trente… veut entreprendre de ramener ceux qui errent, et d’affermir ceux qui vacillent.
Aussi, suivant le témoignage des Saintes Écritures, des saints Pères et des conciles les plus approuvés, ainsi que le jugement et l’accord de l’Église elle-même, il statue, confesse et déclare ce qui suit au sujet du péché originel.
« 1511 1. Si quelqu’un ne confesse pas que le premier homme, Adam, après avoir transgressé le commandement de Dieu dans le Paradis, a immédiatement perdu la sainteté et la justice dans lesquelles il avait été établi et a encouru, par l’offense que constituait cette prévarication, la colère et l’indignation de Dieu et, par la suite, la mort dont il avait été auparavant menacé par Dieu, et avec la mort la captivité sous le pouvoir de celui qui ensuite « a eu l’empire de la mort, c’est-à-dire le diable » He 2,14 ; et que par l’offense que constituait cette prévarication, Adam tout entier, dans son corps et dans son âme a été changé en un état pire : qu’il soit anathème ».
Ainsi le péché originel a touché le « premier homme » entraînant pour lui toutes les conséquences qui sont ici précisées.
1512 2. “Si quelqu’un affirme que la prévarication d’Adam n’a nui qu’à lui seul et non à sa descendance”, et qu’il a perdu la sainteté et la justice reçues de Dieu pour lui seul et non aussi pour nous, ou que, souillé par le péché de désobéissance, “il n’a transmis que la mort” et les punitions “du corps à tout le genre humain, mais non pas le péché, qui est la mort de l’âme” : qu’il soit anathème, » puisqu’il est en contradiction avec l’Apôtre qui dit : “Par un seul homme, le péché est entré dans le monde, et par le péché, la mort et ainsi la mort a passé dans tous les hommes, tous ayant péché en lui ” Rm 5,12 ».
Ainsi, ce péché originel et ses conséquences se transmettent par hérédité à tout le genre humain. Alors notre auteur a raison de dire que la postérité d’Adam est elle aussi « coupable » : « coupable postérité d’Adam, nous naissons enfants de corruption ». C’est bien la foi catholique confessée. « Sontes » c’est le nominatif pluriel de « sons – sontis » qui veut dire « coupable, criminel ». « Coupables », parce que de la « postérité d’Adam », « nous naissons enfants de corruption », « Infecta proles gignimur ». On peut difficilement s’exprimer en termes plus conformes, plus proches du texte de Trente. C’est ce que confesse également le Psaume 50, le psaume davidique : « Voici que je suis né dans l’iniquité et ma mère m’a conçu dans le péché… Purifie-moi avec l’hysope, et je serai pur ; lave moi, et je serai plus blanc que la neige. Annonce-moi la joie et l’allégresse, et les os que tu as brisés se réjouiront » (Ps 50 7-9).
Dans le chapitre 3, le Concile affirme que ce péché originel, qui se transmet par « propagation héréditaire et non pas imitation », ne peut être « enlevé » que par Notre Seigneur, vrai Dieu et vrai Homme et non par une quelconque autre « force de la nature humaine ». Le Concile fonde sa sentence sur l’enseignement de saint Pierre : « Car il n’est pas d’autre nom sous le ciel qui ait été donné aux hommes par lequel nous devons être sauvés » (Ac 4,12).
Voici :
« 1513 3. Si quelqu’un affirme que ce péché d’Adam – qui est un par son origine et transmis par propagation héréditaire et non par imitation, est propre à chacun – est enlevé par les forces de la nature humaine ou par un autre remède que le mérite de l’unique médiateur Notre-Seigneur Jésus-Christ qui nous a réconciliés avec Dieu dans son Sang Rm 5,9, “devenu pour nous justice, sanctification et Rédemption” 1Co 1,30 ou s’il nie que ce mérite de Jésus-Christ soit appliqué aussi bien aux adultes qu’aux enfants par le sacrement conféré selon la forme et l’usage de l’Église : qu’il soit anathème.
Car “il n’est pas d’autre nom sous le ciel qui ait été donné aux hommes par lequel nous devons être sauvés” Ac 4,12. D’où cette parole : “Voici l’Agneau de Dieu, voici Celui qui ôte les péchés du monde” Jn 1,19, et celle-ci “Vous tous qui avez été baptisés, vous avez revêtu le Christ” Ga 3,27.
Le Concile de Trente affirme, dans son chapitre 4, que même les tout-petits sont touchés par le péché originel et doivent aussi recevoir, pour renaître à la vie divine, le saint Baptême. Notre auteur affirme bien que ce péché originel est universel, en ce sens qu’il touche tout le genre humain, petit et grand : « Coupable postérité d’Adam, nous naissons enfants de corruption ». Notre auteur n’exempte personne, ne met aucune limite. C’est la foi catholique enseignée par le Concile de Trente.
Voici encore le texte :
« 1514 4. “Si quelqu’un nie que les tout-petits, qui viennent de naître de leur mère, doivent être baptisés”, même s’ils viennent de parents baptisés, “ou bien dit qu’ils sont certes baptisés pour la rémission des péchés, mais qu’ils ne portent rien du péché originel venant d’Adam qu’il est nécessaire d’expier par le bain de régénération” pour obtenir la vie éternelle, “d’où il suit que pour eux la forme du baptême pour la rémission des péchés n’a pas un sens vrai, mais faux” : qu’il soit anathème.
Car on ne peut pas comprendre autrement ce que dit l’Apôtre : “Par un seul homme le péché est entré dans le monde, et par le péché, la mort, et ainsi la mort a passé dans tous les hommes, tous ayant péché en lui” Rm 5,12, si ce n’est comme l’a toujours compris l’Église catholique répandue en tous lieux. C’est en effet à cause de cette règle de foi venant de la tradition des Apôtres “que même les tout-petits, qui n’ont pas encore pu commettre aucun péché par eux-mêmes, sont pourtant vraiment baptisés pour la rémission des péchés, afin que soit purifié en eux par la régénération, ce qu’ils ont contracté par la génération”. En effet, “nul, s’il ne renaît de l’eau et de l’Esprit Saint, ne peut entrer dans le Royaume de Dieu” Jn 3,5.
Enfin, après avoir précisé le sens de cette « remise » du péché originel par le baptême et les mérites du Christ Jésus, dans son chapitre 5, le saint Concile de Trente en vient à la situation de Notre-Dame : c’est le chapitre 6 : « 1516 6. Cependant, ce même saint concile déclare qu’il n’est pas dans son intention de comprendre dans ce décret, où il est traité du péché originel, la bienheureuse et immaculée Vierge Marie, Mère de Dieu, mais que l’on doit observer les constitutions du pape Sixte IV, d’heureuse mémoire, sous la menace des peines qui y sont contenues, constitution qu’il renouvelle ».
C’est bien ce que confesse notre auteur : « Nous croyons que vous seule, Ô Vierge, ignorez la tâche originelle », « Labis paternae nescia Tu sola, Virgo, crederis », « Vous Seule, ne connaissez pas la tâche originelle ». Vous remarquerez, au passage, l’expression latine de notre auteur pour exprimer « le péché originel ». Littéralement, il parle de chute, de ruine « labes – labis », « paternae » qui veut dire : « la chute paternelle, provenant du père, relative au père ». On ne peut être plus réaliste et plus proche de l’enseignement du Concile de Trente : le péché originel est un péché de nature, qui se transmet par génération : « labis paternae »
Troisième strophe
« Caput draconis invidi Tu conteris vestigio, Et sola gloriam refers Intaminatae originis »
« Votre pied écrase la tête du dragon jaloux, et seule vous avez la gloire d’une origine immaculée »
Cette strophe nous rappelle l’enseignement du « Protévangile », l’enseignement de Notre Dieu s’adressant au Serpent, après qu’Adam et Eve aient commis leur « crime » : « Yahweh Dieu dit au serpent : « Parce que tu as fait cela, tu es maudit entre tous les animaux domestiques et toutes les bêtes des champs ; tu marcheras sur ton ventre, et tu mangeras la poussière tous les jours de ta vie. Et je mettrai une inimitié entre toi et la femme, entre ta postérité et sa postérité ; celle-ci te meurtrira à la tête, et tu la meurtriras au talon. » (Gen 3 14 15). Notre auteur manifestement s’en inspire lorsqu’il écrit : « Votre pied écrase la tête du dragon jaloux ». Et de fait, beaucoup de statues de la Vierge Marie représentent le serpent écrasé sous le pied de Notre-Dame. « Conterere » c’est un verbe à la signification très rude. Il veut dire : « broyer, user, épuiser », et dans un sens moral : « accabler, mépriser ». Ainsi de la Vierge Marie dans son rôle de défenseur du genre humain. Elle « broie » de son pied le serpent : « vestigio » de « vestigium » qui veut dire « pied, la plante du pied ». Elle lui broie la tête : « vous écrasez de votre pied la tête du dragon », « Tu conteris vestigio caput draconis ». C’est très imagé : on écrase bien que de la pointe des pieds. Et l’auteur donne un qualificatif au « dragon » : il est « jaloux », « du dragon jaloux ». « Invidi » : de « invidus » qui vient de « invidere » qui veut dire : « voir d’un mauvais œil, envier, jalouser ». Tel est le Dragon depuis la victoire de la Vierge et des enfants de Marie, dans la victoire du Christ sur la Croix. La Passion du Christ lui a arraché en effet ses victimes, ses esclaves. On comprend qu’il puisse en être « amer », « jaloux ».
Pour bien le comprendre, il suffit ici de se remémorer les fruits de la Passion du Christ.
Par sa Passion, Jésus-Christ nous a délivrés du péché. « Il nous a aimés, dit Saint Jean, et Il nous a lavés de nos péchés dans son Sang » (Apo 1 5). Et encore, comme dit l’Apôtre, « Il nous a fait revivre avec Lui, nous remettant tous nos péchés, effaçant l’arrêt de condamnation écrit et porté contre nous, l’abolissant et l’attachant à la Croix » (Col 2 13-14). Ensuite, par cette délivrance de nos péchés, le Christ Seigneur nous a arrachés à la tyrannie du Démon. « Voici maintenant le jugement du monde, dit le Sauveur Lui-même, et le prince de ce monde va en être chassé, et Moi, quand j’aurai été élevé de la terre, J’attirerai tout à Moi… » (Jn 12 30-32). De plus, par sa Passion, Il nous a réconciliés avec son Père (2 Cor 5 18), Il l’a apaisé, et nous l’a rendu favorable. Or, le Démon sera éternellement l’ennemi de Dieu… On comprend la jalousie qu’il nous porte… Enfin, en enlevant nos péchés, le Sauveur nous a ouvert la Porte du Ciel que le péché commun à tous les hommes avait fermée. C’est ce que l’Apôtre nous marque bien dans ces paroles : « Nous avons la confiance d’entrer dans le Sanctuaire, par le Sang de Jésus-Christ » (Heb 10 19)… Depuis que le Rédempteur a subi cette Mort, les Portes du Ciel sont ouvertes à tous ceux qui, purifiés par les Sacrements, et possédant la Foi, l’Espérance et la Charité, deviennent participants des mérites de sa Passion ». Or, de ce Ciel, le Serpent et ses Anges en sont définitivement exclus par leurs péchés d’orgueil refusant le Mystère de l’Incarnation. On comprend qu’il puisse nous porter de la « jalousie » et nous regarder « d’un œil mauvais ».
Et notre auteur poursuit sa strophe en revenant sur le Mystère de l’Immaculée Conception. On pourrait se demander : mais pourquoi revenir sur ce mystère de l’Immaculée Conception, alors qu’il vient de le confesser à la strophe précédente ? Je pense que cette nouvelle allusion au mystère de l’Immaculée Conception est parfaitement en situation. En effet, après avoir rappelé le péché originel et ses conséquences, il est bon de rappeler que Notre-Dame fut exemptée de tout cela, à savoir : de la « perte de la sainteté et de la justice originelles ». Par son Immaculée Conception, elle est, au contraire, aux yeux de Dieu, toute sainteté et toute justice. Elle n’a pu, étant exempte du péché originel, « encourir la colère et l’indignation de Dieu », elle n’a pu être retenue dans les « filets de la mort », n’ayant pu connaître cette menace parce qu’Immaculée ; elle n’a pu connaître un seul instant la captivité sous le pouvoir de celui qui, suite au péché originel, « a eu l’empire de la mort, c’est-à-dire le diable » (He 2,14). Puisque c’est elle, au contraire qui doit le terrasser et l’a, de fait, terrassé dans son Immaculée Conception et qu’ainsi, à la différence d’Adam et d’Eve, elle est toute « belle et innocente » et constituée par la miséricorde de Dieu dans un état « merveilleux ». « Immaculée ».
Il était, vous le voyez, très heureux de rappeler in fine la vraie situation de Notre-Dame : à la différence de tout le genre humain, elle a été constituée dans un état de sainteté. Je suis l’Immaculée Conception, dit-elle à Saint Bernadette.
Quatrième strophe
« O gentis humanae decus, Quae tollis Hevae opprobrium ; Tu nos tuere supplices, Tu nos labantes erige »
« Ô gloire de la race humaine, qui effacez l’opprobre d’Eve, protégez-nous, nous vous en supplions, relevez-nous quand nous tombons »
Et de fait, parce qu’elle est l’Immaculée Conception et qu’elle n’a pas connu les tares qu’ont touché tout le genre humain, ce que notre auteur a laissé entendre dans la strophe précédente, il est bien-fondé de dire, maintenant, que Marie est « la gloire du genre humain ». « O gentis humanae decus ». « Decus », c’est « la beauté, l’ornement, la parure, la gloire ». Tous ces sens conviennent parfaitement à Notre-Dame. Le mot « gloire » est bien choisi.
Et parce qu’elle est « la gloire de la race humaine », elle « efface l’opprobre d’Eve ». « Tollis » : « elle enlève l’opprobre d’Eve ». Eve était devenue, par sa prévarication, « la Mère du genre humain déchu ». Quelle opprobre ! Marie, devient par sa sainteté unique, la mère du genre humain « régénéré dans le Christ Seigneur ». Quelle gloire !
Alors pour cette raison, nous sommes fondés à vous supplier, « supplices », de nous protéger dans notre pérégrination terrestre « Tu nos tuere » et à nous relever quand nous tombons, « Tu nos labantes erige ».
Il faut faire remarquer que nous retrouvons ici, les mêmes constructions de phrases que dans le Canon Romain de notre Messe latine et grégorienne jusqu’au mot même : « supplices ». « Tu nos tuere supplices » me fait penser à la prière du Canon Romain commençant par ce même mot : « Supplices te rogamus ». C’est le même mot. C’est la même construction verbale : « Supplices te rogamus, omniptens Deus ; jube haec perferri per manus Angeli tui in sublime altare tuum, in conspectu divinae Majestatis tuae… » « Nous te supplions… ordonne que ces offrandes soient portées… sur l’autel… ». Ici nous avons : « Tu nos tuere supplices », « nous te supplions, protège nous ». C’est un impératif. C’est un ordre. Il en est de même pour le « Tu nos labantes erige » « relève nous quand nous tombons ». C’est là aussi un impératif : « Erige », « relève-nous ». On retrouve cette même construction littérale dans la prière du « Hanc igitur » de la messe grégorienne : « Hanc igitur oblationem servitutis nostrae…quaesumus Domine, ut placatus accipias ; diesque nostros in tua pace disponas, atque ab aeternua damnatione nos eripi, et in electorum tuorum jubeas grege numerari ».
C’est à noter. Ces écrivains sacrés avaient vraiment le sens liturgique !
Cinquième strophe
« Serpentis antiqui potens Astus retunde et impetus, Ut caelitum perennibus Per te fruamur gaudiis »
« Vierge puissante, repoussez les ruses et les attaques de l’antique serpent, pour que, grâce à vous, nous jouissions des joies éternelles des habitants des cieux »
« Potens » « Vierge puissante ». C’est un des qualificatifs de la Vierge Marie : Elle est présentée comme « une véritable armée », « elle est forte comme une armée rangée en bataille ». Elle est dite « avoir terrassée toutes les hérésies », « tous les ennemis de l’Eglise au cours des temps ».
Oui ! Elle est la « Vierge puissante ». L’Eglise le confesse dans ses Litanies.
Elle a terrassé tous les ennemis de la chrétienté ! Je pense à l’instant à la victoire de la bataille navale de Lépante, le 7 octobre 1571.
Les forces ottomanes ne cessaient d’envahir les terres de l’Occident, comme aujourd’hui. Les pourtours de la Méditerranée étaient sous sa domination. L’Occident avait à craindre grandement. Pie V réussit à réunir une flotte sous le commandement du frère de Philippe II d’Espagne. La bataille navale se déroule à Lépante. Le pape avait sollicité dans toute la chrétienté la protection de Marie.
C’est vers elle qu’il se tourne ce 7 octobre 1571 après 17h. De la fenêtre de son palais apostolique, il contemple en vision l’issue heureuse du combat de Lépante. Il se retourne et dit aux prélats qui l’entourent : « Allons rendre grâce à Dieu : notre armée est victorieuse ». C’est seulement le 26 octobre que la nouvelle arrive à Rome. C’est la liesse dans les villes de la Chrétienté.
En commémoration de cette victoire navale, saint Pie V ajouta aux Litanies de la très Sainte Vierge, une invocation supplémentaire : « Secours des chrétiens, priez pour nous », et il ordonna l’institution de la fête de Notre-Dame des Victoires que Grégoire XIII fera ensuite célébrer, sous le nom de fête du Rosaire, chaque premier dimanche d’octobre dans toutes les églises.
Au sein du peuple catholique la victoire de Lépante contribua grandement à l’essor de la dévotion du Rosaire.
Ainsi Notre-Dame protège-t-elle son peuple, protège-t-elle les nations qui lui sont consacrées. Elle a protégé la France de l’invasion ennemie. Ainsi a-t-elle été la raison de la victoire de la bataille de la Marne en France… Elle protège ses enfants en venant les encourager à la prière, comme à Pontmain : « Priez, Mes enfants, mon Fils se laisse toucher », comme à Lourdes en soulageant et les corps et les âmes…
Fort de la certitude de sa toute puissance, on peut alors légitimement la supplier de « repousser les ruses et les attaques de l’antique serpent », « Retunde astus et impetus serpentis antiquis ».
Mais quelles sont donc, aujourd’hui plus spécialement, les « ruses » et « les attaques de l’antique Serpent » sur le monde moderne ? Il faut impérativement répondre à ces questions pour échapper à ses ruses et à ses attaques. Pour y répondre, nous nous inspirerons de la pensée de Jean-Paul II et de son ouvrage Mémoire et Identité.
La première ruse, c’est l’idéalisme.
Alors que l’homme, avant la Philosophie des Lumières et même avant la Réforme, vivait dans le respect de la Transcendance, dans le respect de Dieu, aujourd’hui, l’homme vit dans un immanentisme absolu, replié sur lui-même, coupé de Dieu. Il vit dans un indifférentisme absolu de Dieu. C’est l’anthropocentrisme, caractéristique, nous dit Jean-Paul II, du temps présent. Et il attribue cela à la philosophie cartésienne qui peut se résumer au fameux « cogito, ergo sum ». Voilà, dit-il « la culture dominante » actuelle. (Mémoire et Identité, p. 19). Avec ce « cogito ergo sum », on assiste à une « révolution de la pensée philosophique». Elle est opérée par Descartes.
Il s’explique : Le « cogito, ergo sum » apporta un bouleversement dans la manière de faire de la philosophie. Dans la période pré-cartésienne, la philosophie, et donc le cogito (je pense), ou plutôt le cognosco (je connais) étaient subordonnés à l’esse (être), qui était considéré comme quelque chose de primordial (NDLR : je ne suis pas sûr que ce soit la meilleure traduction ; au lieu de « primordial », je verrais mieux ici « premier »). Pour Descartes, à l’inverse, l’esse apparaissait secondaire, tandis qu’il considérait le cogito comme primordial (premier). Ainsi, non seulement on opérait un changement de direction dans la façon de faire de la philosophie, mais on abandonnait de manière décisive ce que la philosophie avait été jusque-là, en particulier la philosophie de saint Thomas d’Aquin : la philosophie de l’esse. Auparavant, tout était interprété dans la perspective de l’esse et l’on cherchait une explication de tout selon cette perspective. Dieu, comme Etre pleinement auto-suffisant (ens subsistens) était considéré comme le soutien indispensable pour tout ens non subsistens, pour tout ens participativum, c’est-à-dire pour tout être créé, et donc aussi pour l’homme. Le cogito, ergo sum portait en lui la rupture avec cette ligne de pensée. L’ens cogitans (être pensant) devenait désormais primordial. Après Descartes, la philosophie devient une science de la pure pensée : tout ce qui est esse − tout autant le monde créé que le Créateur − se situe dans le champ du cogito, en tant que contenu de la conscience humaine. La philosophie s’occupe des êtres en tant que contenus de la conscience, et non en tant qu’existant en dehors d’elle » (p. 21).
Voilà le péché du monde, dans lequel Satan tient le monde moderne !
Jacques Maritain s’exprime de la même manière, dans son ouvrage fameux : Les Trois Réformateurs :
« L’entendement cartésien revendique indépendance à l’égard de son objet, non seulement à l’égard des choses comme objet du sens, mais à l’égard des choses comme objet de science… Dès lors, l’intelligence humaine devient législatrice en matière spéculative, elle façonne son objet… c’est l’arbitraire qui s’introduit… Ainsi pratiquement, l’évidence cartésienne devait substituer à la vérité, mesurée sur l’être, la facilité rationnelle et la maniabilité des idées… Mon acte d’appréhension pris comme tel ne saisit que ma pensée, ou une représentation, une effigie peinte en elle. L’idée devient ainsi le seul terme immédiatement atteint par la pensée, la chose, portrait ou tableau, comme d’abord elle-même avant de faire connaître autre chose… C’est une véritable « réification » des idées… la faute originelle de la philosophie moderne ».
(NDLR : Je pense que Maritain veut dire ici « chosification » en ce sens que l’idée devient le propre objet, la « chose » du « cogito »).
Dès lors, continue très heureusement Maritain, déduisant une conséquence fondamentale de cette philosophie idéaliste : « cette philosophie (qui est dénaturation de la raison − Maritain parle d’angélisme ») devait nous conduire à revendiquer pour notre intelligence l’autonomie parfaite et la parfaite immanence, l’indépendance absolue, « l’aséité » de l’intelligence incréée » (p. 113) i.e. de Dieu même.
L’homme se fait « Dieu ». C’est à proprement parler la tentation démoniaque : « Vous serez comme des dieux, connaissant le bien et le mal » (Gen 3, 5). C’est le péché originel. Il poursuit, dans le temps présent, sa « ruse » éternelle. Le grand mensonge !
Oui ! Il ne faut pas craindre de le dire, toujours avec Jacques Maritain : « cette revendication, … reste le principal secret de la dissolution de notre culture, et du mal dont l’Occident apostat veut mourir » (p. 114).
C’est la ruse où Satan entraîne l’Europe et le monde entier…
Ainsi, dans une telle philosophie idéaliste, Dieu devient « la libre élaboration de la pensée humaine » : « Dans la logique du Cogito, ergo sum, Dieu était réduit à un contenu de la conscience humaine ; il ne pouvait plus être considéré comme Celui qui explique jusqu’au plus profond le sum humain. Il ne pouvait donc demeurer comme l’ens subsistens, l’être auto-suffisant, comme le Créateur, Celui qui donne l’existence, ni même Celui qui se donne Lui-même dans le mystère de l’Incarnation, de la Rédemption et de la Grâce. Le Dieu de la révélation avait cessé d’exister comme « Dieu des philosophes ». Seule demeurait l’idée de Dieu, comme thème d’une libre élaboration de la pensée humaine » (pp. 22-23).
Dès lors, « l’homme (reste) seul : seul comme créateur de sa propre histoire et de sa propre civilisation ; seul comme celui qui décide de ce qui est bon et de ce qui est mauvais, comme celui qui existerait et agirait − etsi Deus non daretur − même si Dieu n’existait pas » (p. 23).
C’est l’attaque du Serpent devant la crédulité d’Eve.
Ainsi Dieu étant mesuré par la seule intelligence humaine, il peut être, comme ne pas être, selon la « fantaisie » de la pensée humaine. Ce n’est plus l’homme qui dépend de Dieu, c’est Dieu qui dépend de l’homme. Si c’est seul l’homme qui « décide de ce qui est bon et de ce qui est mauvais » selon sa seule volonté, la loi peut être définie comme « étant l’expression de la volonté générale », et non plus comme l’expression de la Sagesse de Dieu. Voilà la racine de l’athéisme moderne où l’homme se referme sur lui-même. Satan veut retenir l’homme dans cet univers philosophique.
N’étant mesuré par rien, « l’homme est également soumis à n’importe quoi » (« Trois Réformateurs », p. 115), à une « législation contre-nature », à « l’extermination légale des êtres humains conçus et non encore nés », à des unions homosexuelles comme une forme alternative de la famille (Jean-Paul II id pp. 24-25), soumis à une véritable « dé-création », disait Charles Péguy. C’est l’idéal de notre Démon.
Le pape Jean-Paul II le reconnaissait : « Pourquoi tout cela arrive-t-il ? Quelle est la racine de ces idéologies de l’après-Lumières ? En définitive, la réponse est simple : cela arrive parce que Dieu en tant que Créateur a été rejeté et, du même coup, la source de détermination de ce qui est bien et de ce qui est mal. On a aussi rejeté la notion de ce qui, de manière plus profonde, nous constitue comme êtres humains, à savoir la notion de « nature humaine » comme « donné réel », et à sa place, on a mis un « produit de la pensée » librement formé et librement modifiable en fonction des circonstances » (p. 25) et du nombre.
L’homme se fait « dieu ». Voilà qui est clairement dit. Il décide de tout, indépendamment de Dieu et de sa Loi, naturelle ou surnaturelle. Il n’en veut plus. En raison de son athéisme. Et la loi dépend de lui seul, indépendamment de Dieu. Il se fait sa loi dans son propre univers idéalisé.
Ainsi cette nouvelle philosophie, cette nouvelle politique, tout à fait démoniaque, est finalement, une manifestation dans « ce temps », du péché originel dont nous parle la Genèse au chapitre 3. C’est, finalement là, la véritable et la plus fondamentale raison de la pensée moderne. Elle permet de multiplier les œuvres de mort. Ainsi, sera toujours vraie la sentence de saint Paul : « Stipendia peccati, mors » (le salaire du péché, c’est la mort). Le péché n’est rien d’autre, finalement, selon la belle définition de saint Augustin que l’« amor sui usque ad contemptum Dei » (l’amour de soi jusqu’au mépris de Dieu). « C’est précisément l’amor sui qui a poussé nos premiers parents dans la rébellion initiale et, aussi, déterminé la diffusion ultérieure du péché dans toute l’histoire de l’homme. C’est à cela que se réfèrent les paroles du livre de la Genèse : « Vous serez comme des dieux, connaissant le bien et le mal (Genèse 3 5), c’est-à-dire c’est vous-mêmes qui déciderez de ce qui est bien et de ce qui est mal » (Jean-Paul II ib p. 18). Et cela, dans un total subjectivisme.
Alors, comment revenir au bien, à l’ordre ? Comment combattre cette idéologie, « satanique » ? Comment triompher de cette « apostasie silencieuse », comment vaincre cette « civilisation de la mort », cette attaque ultime du Démon ?
Je dirais volontiers que l’analyse que nous venons de faire contient la réponse à cette angoissante question.
Si l’idéalisme est la raison du mal contemporain, il faut rompre avec cet idéalisme, avec l’« idée cartésienne ». Il faut d’abord revenir à la « philosophie pérenne ». Il faut revenir à saint Thomas d’Aquin, c’est-à-dire à la philosophie de l’être » (Jean-Paul II id p. 25).
Et il ne suffit pas d’en rester aux études phénoménologiques… Non ! Il faut revenir à la réalité de l’être, à savoir qu’il existe un être créé, et aussi un être absolu. Car si l’on ne part pas de tels présupposés « réalistes », on finit par se mouvoir dans le vide (Jean-Paul II ib p. 25).
Il existe un être « absolu » – Dieu – qui est la raison de toutes choses. Et toutes choses n’ont leur être, leur raison d’être qu’en Lui. Il est donc l’Être premier autour duquel tout doit s’ordonner. Voilà ce qu’on appelle s’ordonner selon la justice, selon l’être, le vrai. Le retour à l’être et donc ultimement à Dieu, l’« ens subsistens », est la voie royale du salut du genre humain, pour qu’il ne reste pas enfermé dans son « ego », oublieux de Dieu, et de sa loi et qu’il puisse ainsi surmonter l’hérésie du monde moderne : le subjectivisme et sortir de l’esclavage de Satan.
Il faut y insister.
C’est bien cela l’hérésie de ce siècle. Comme nous l’avons déjà dit ̶ et là nous nous inspirons du cardinal Pie et de ses synodales ̶ dans cette hérésie moderne, l’homme « devient une sorte d’enceinte fortifiée et de camp retranché ; il s’enferme comme dans un domaine propre et tout à fait inaliénable. Il s’y pose comme y étant complétement maître de lui-même, armé d’imprescriptibles droits, ayant à demander des comptes mais n’en n’ayant jamais à rendre. Il considère de là les voies de Dieu, ses propositions et ses ordonnances, ou du moins ce qu’on lui présente comme tel, et il juge tout avec une indépendance absolue. En somme, il se suffit à lui-même et, possédant en soi son principe, sa loi, sa fin ̶ Pie IX condamne précisément cette proposition. C’est l’article 3 du Syllabus : III. La raison humaine, considérée sans aucun rapport à Dieu, est l’unique arbitre du vrai et du faux, du bien et du mal : elle est à elle-même sa loi, elle suffit par ses forces naturelles à procurer le bien des hommes et des peuples (26) ̶ il est son monde et il devient à peu près son Dieu. Et s’il est par trop manifeste que l’individu, pris comme tel, est indigent sur beaucoup de points et insuffisant pour beaucoup de choses, néanmoins pour se compléter, il n’a pas à sortir de son ordre ; il trouve dans l’humanité, dans la collectivité, ce qui lui manque personnellement. Là est le fondement de la doctrine révolutionnaire de la souveraineté de l’homme, incarné dans la souveraineté du peuple » (Cardinal Pie. De A à Z, p. 642).
L’homme se suffit à lui-même, dans une indépendance absolue.
Mais là, apparaît la grande erreur de cette idéologie. Car Dieu lui-même s’est incarné, c’est le mystère de l’Incarnation-Rédemptrice, mystère de justice et de miséricorde qui ne peut être refusé par la raison humaine sans outrecuidance.
Jésus-Christ n’est pas facultatif. En dehors de sa loi révélée, il n’existe pas, il n’existera jamais de juste milieu philosophique et paisible où l’on puisse trouver la règle de sa vie.
« Et Dieu a exalté son Fils et lui a donné un nom qui est au-dessus de tout nom, afin qu’au nom de Jésus, tout genou fléchisse au ciel, sur la terre et dans les enfers, et que toute langue confesse que le Seigneur Jésus-Christ est dans la gloire de Dieu le Père » (Phil 2 9 11).
Mais accepter le naturalisme tel que définit plus haut, c’est vouloir qu’en dehors et qu’en face de la science chrétienne puisse s’élever une autre science totalement indépendante de Dieu et de son Christ ; « et Dieu nous a donné des armes puissantes pour détruire cette forteresse philosophique où vous vous retranchez, pour renverser toute hauteur qui s’élève contre la science de Dieu et pour captiver toute intelligence sous le joug de Jésus-Christ » (2 Cor 10 4-6).
C’est ce qu’a fait le Démon. Il est tombé dans un naturalisme absolu !
Accepter le naturalisme tel que défini et son auto-suffisance, son indépendance de Dieu, c’est accepter un Christ restreint, limité, ou même et surtout « refusé » ; or n’oublions pas qu’il a « plu à Dieu de restaurer, de récapituler toutes choses en Jésus-Christ » (Eph 1 10, 22) et « de lui soumettre tellement la nature entière que rien n’échappe à son empire » (Hb 2 8). Comme l’écrit le cardinal Pie : « Non, encore un coup, Vous ne ferez pas un Christ qu’on puisse accepter ou refuser à sa guise, qu’on puisse abandonner au libre choix et au caprice personnel de chacun. Le Christ est la pierre angulaire, hors de laquelle il n’y a pas de salut ; car il n’y a pas sous le ciel d’autre nom donné aux hommes dans lequel ils puissent être sauvés, si ce n’est le nom de Jésus » (Act 4 11-12).
Et tout autant le Christ Lui-même a dit : « Je suis la vigne et vous êtes les branches ; si le sarment adhère à la vigne, il produit beaucoup de fruit ; sinon rien ; on le mettra dehors et il sèchera et on le jettera au feu et il brûlera » (Jn 15 4-6)
Qu’on relise le commentaire de saint Augustin et l’on comprendra que vaine est cette philosophie « idéaliste », « naturaliste », « rationaliste » qui veut élaborer toute une sagesse en dehors du Christ, la ruse du Serpent…
Ecoutez : « De peur, dit-il que le sarment ne crût pouvoir produire quelque petit fruit par lui-même, le Sauveur après avoir dit que le rameau uni au cep produira de grands fruits, n’ajoute pas que sans cette union il en produira un peu, mais qu’il ne produira rien. Ni peu, ni beaucoup, rien n’est possible à l’homme pour le salut qu’à la condition de son union avec le Christ qui est la vigne ; s’il n’est adhérant au cep, s’il ne puise sa sève dans la racine, il ne peut porter le moindre fruit par lui-même… Et comme sans cette vie qui procède de l’union avec le Christ, il n’est pas au pouvoir de l’homme de mourir ou de ne pas mourir, celui qui ne demeure pas dans le Christ sera mis dehors, et il sèchera et on le jettera au feu et il brûlera… Autant ce bois, qui se serait couvert de pampres et de raisins et qui aurait produit le vin généreux, i.e. la plus noble des substances, aurait acquis de gloire en demeurant dans la vigne, autant il devient méprisable s’il n’y demeure pas. L’alternative inévitable pour le sarment, c’est la vigne ou le feu. S’il n’est pas dans la vigne, il sera dans le feu ; afin de n’être pas jeté au feu qu’il reste donc uni à la vigne… ». Mais c’est ce que ne veut pas le Démon…
« Alors je vous dis : Entendez ce langage, vous qui vous complaisez en vous-même, vous qui ne craignez pas de dire : « C’est de Dieu que nous tenons notre nature, notre raison ; mais notre nature et notre raison nous étant données, c’est de notre propre fonds que nous pouvons tirer notre vertu et notre justice. Telle est votre vaine présomption ; mais voyez ce qui vous attend et s’il vous reste quelque sentiment, frémissez d’horreur ! Celui qui croit porter du fruit par lui-même, n’est pas dans la vigne, i.e. n’est pas dans le Christ ; et s’il n’est pas dans le Christ, il n’est pas chrétien : voilà la profondeur de votre abîme ». Pour la nature humaine, dans sa condition présente, il n’y a pas de destinée intermédiaire : ou le Christ ou le feu… Aut vitis aut ignis. Si in vite non est, in igne erit. Pour éviter la flamme, qu’elle demeure donc fidèlement unie au Christ : Ut ergo in igne non sit, in vite sit ».
Et voilà ce que veut réaliser le Serpent : nous détacher de la Vigne pour que nous connaissions la mort et le feu ! Il est l’ennemi de la Vie, du Christ, de la Vierge et de l’homme sauvé (Apoc 12, 13, 14).
Ainsi l’affirmation de l’indépendance de l’homme vis-à-vis de Dieu et de sa loi est vaine tant que subsisteront les oracles sacrés et, en particulier, ce chapitre 15 de l’Evangile de saint Jean, celui de la Vigne : « Je suis la véritable vigne… », c’est-à-dire, toujours !
Mais il faut entendre un autre argument contre la philosophie moderne qui veut se passer de Dieu, argument pris encore du cardinal Pie. Le voilà :
« Non, jamais on ne sauvera les nations, jamais on ne rétablira l’ordre moral et social au moyen de l’impiété. Or, depuis que Jésus-Christ est venu sur la terre, quiconque refuse de le reconnaître et de lui obéir – ce que fait le laïcisme suggéré par Satan ̶ est un impie. Il est en révolte non seulement contre le Fils, mais contre le Père qui l’a envoyé ; il pèche non seulement contre la Révélation, mais contre la raison qui ne permet point de mépriser la parole révélée de Dieu… « Si je n’étais pas venu et que je ne leur eusse pas parlé, dit le Sauveur, ils seraient excusables. Mais maintenant ils ne sauraient être excusés de leur péché (…). Si je n’avais pas fait au milieu d’eux des œuvres que nul autre n’a faites, leur faute serait pardonnable ; mais maintenant ils ont vu mes œuvres, et ils me haïssent et en me haïssant, ils haïssent mon Père » (Jn 15 22-24)… Or, Dieu ne versera pas ses bénédictions sur les contempteurs de son Fils ».
Vaine est cette philosophie de l’absolue indépendance de l’homme pour la construction de l’ordre politique…
Et l’on comprend alors pourquoi il y a une véritable opposition entre
-cette philosophie anthropocentrique, idéaliste, démoniaque où tout est replié sur l’homme,
– et le christianisme.
En effet, le christianisme dans son essence est tout surnaturel, ou plutôt c’est le surnaturel même en substance et en acte. Dieu surnaturellement révélé, connu. Dieu surnaturellement aimé et servi, surnaturellement donné, possédé et goûté : c’est tout le dogme, toute la morale, tout le culte et tout l’ordre sacramentel chrétien. La nature y est indispensablement supposée à la base de tout ; mais elle y est partout dépassée. Le christianisme est l’élévation, l’extase, la déification de la nature créée. Or, le naturalisme nie avant tout ce surnaturel.
« Le naturalisme, fils de l’hérésie, est donc bien plus qu’une hérésie ; il est le pur antichristianisme. L’hérésie nie un ou plusieurs dogmes, le naturalisme nie qu’il y ait des dogmes et qu’il puisse y en avoir. L’hérésie altère plus ou moins les révélations divines ; le naturalisme nie que Dieu soit révélateur. L’hérésie renvoie Dieu de telle ou telle portion de son royaume ; le naturalisme l’élimine du monde et de la création… Cette erreur se dresse ainsi en hostilité complète contre le christianisme… Il s’ensuit que sa loi fatale, son besoin essentiel, sa passion obstinée… son œuvre réelle, c’est de détrôner le Christ et de Le chasser de partout – « Ils L’ont découronné », disait un siècle plus tard Mgr Lefebvre : ce qui sera la tâche de l’antéchrist, et ce qui est l’ambition suprême de Satan… Oui, tel est le dernier mot de cet exécrable programme. Le Christ, notre unique Seigneur et Sauveur, i.e. le Christ qui est deux fois notre Maître, Maître parce qu’il a tout fait, Maître parce qu’il a tout racheté, il s’agit de L’exclure de la pensée et de l’âme des hommes, de Le bannir de la vie publique et des mœurs des peuples, pour substituer à son règne ce qu’on appelle le pur règne de la raison ou de la nature » (p. 644).
C’est bien le programme de Satan.
Les conséquences sont grandes.
En effet, lorsque l’homme oublie Dieu, lorsqu’il se substitue à Lui, il Lui usurpe le droit de décider ce qui est bien et ce qui est mal. Il se fait dieu à la place du vrai Dieu et décide à sa guise de la vie et de la mort. Ainsi des régimes démocratiques laïques et athées : ils se permettent de légiférer scandaleusement sur l’avortement, sur l’euthanasie…
Oui ! Face à ce drame moderne, à son irrespect de la vie et à sa négation de la sublimité de la vie humaine, travaillons au retour de la philosophie de l’être, travaillons au Règne du Christ, par le Règne de Marie. Salve Maria. Notre-Dame est en effet l’archétype de toute vraie chrétienté, parce qu’elle est celle qui s’est soumise à la Loi de Dieu. « Fiat voluntas tua ». Elle fut exaltée par son Fils en raison de sa soumission à la loi de Dieu : « Qui est mon frère, qui est ma mère, qui est ma sœur… celui qui fait la volonté de mon Père qui est dans les cieux » ; « Bienheureuse celle qui vous a nourri », « Bienheureuse plutôt celle qui fait la volonté de mon Père ».
Marie est ainsi l’archétype de la chrétienté. Deo Gratias ! Elle a ainsi terrassé le Démon.
Et c’est pourquoi elle n’a qu’une pensée, nous conduire au Ciel. Aussi sont bienvenues ces suppliques de notre auteur : « Vierge puissante, repoussez les ruses et les attaques de l’antique serpent, pour que, grâce à vous, nous jouissions des joies éternelles des habitants des cieux » : « Ut caelitum perennibus Per te fruamur gaudiis ». « Fruamur » de « frui » qui veut dire « avoir la jouissance de », « jouir », « goûter » « les joies éternelles du Ciel ».
Notre auteur ne pouvait mieux terminer cette hymne que par cette « supplique » : obtenir « les joies éternelle du Ciel ».
Quelles sont-elles « ces joies éternelles » ?
Le dernier article du Symbole de la foi nous les précise. C’est un des objets premiers de la foi des fidèles. Il est peut-être ultime dans l’ordre de la réalisation. Mais il est premier dans l’ordre de la vie quotidienne. Comme le dit le Catéchisme du Concile de Trente : « les fidèles doivent sans cesse avoir devant les yeux cette félicité si pleine et si complète, et en faire le but et la fin de toutes leurs pensées et de tous leurs désirs ». Le Catéchisme va parler des « magnifiques récompenses de la Vie Eternelle ».
Quand je parle de la « Vie éternelle », j’entends exprimer : « l’éternité de la béatitude ; béatitude qui comblera tous les désirs du bienheureux ». « C’est un bonheur souverain et parfait ». C’est un « bonheur qui n’est limité par aucun temps », qui « une fois acquis, ne peut plus se perdre ». C’est une condition sine qua non de la béatitude : « Celui qui est heureux, peut-il ne pas désirer ardemment de jouir sans fin de ce qui fait son bonheur ? Et sans l’assurance d’une félicité stable et certaine, ne sera-t-il pas malgré lui en proie à tous les tourments de la crainte ? S’il en est ainsi, on comprend « avec quel zèle, avec quelle ardeur nous devons nous empresser vers cette Vie Eternelle, qui détruit tous les maux, et nous offre l’abondance parfaite de tous les biens ».
Mais quelle est donc la nature de cette félicité éternelle ?
C’est à la fois la délivrance de tous les maux, et la possession de tous les biens. En ce qui concerne les maux, nos Saints Livres sont clairs et formels. Ainsi il est écrit dans l’Apocalypse : « Les Bienheureux n’auront plus ni faim, ni soif ; le soleil, ni aucune chaleur ne les incommodera plus » (Apoc 7 16). Et ailleurs : « Dieu essuiera toutes les larmes de leurs yeux ; il n’y aura plus ni mort, ni deuil, ni cris, ni douleur, parce que le premier état sera passé » (Apoc 21 4).
Pour les biens, « la gloire des bienheureux sera immense, et en même temps, ils posséderont tous les genres de joie et de délices ». Il faut distinguer deux sortes de biens : les uns qui tiennent, nous dit le Catéchisme du Concile de Trente, « à la nature même du bonheur », « les autres qui n’en sont que des conséquences ». On appelle les premiers, les « biens essentiels », les seconds, « les biens accidentels ». Le premier des biens essentiels, « la véritable béatitude », consiste dans la vision de Dieu et la connaissance de sa Beauté, principe et source de tout Bien et de toute Perfection ! La Vie Eternelle, dit Notre-Seigneur Jésus-Christ, « c’est de Vous connaître, Vous, le seul Dieu véritable, et Celui que vous avez envoyé, Jésus-Christ » (Jn 17 3). Paroles que saint Jean semble expliquer quand il dit : « Mes bien-aimés, nous sommes maintenant les enfants de Dieu ; mais ce que nous serons un jour ne paraît pas encore. Nous savons que lorsque Jésus-Christ se montrera, nous Lui serons semblables, parce que nous Le verrons tel qu’Il est » (I Jn 3 2). Il nous fait entendre ainsi que la béatitude consiste en deux choses : à voir Dieu tel qu’Il est en Lui-même et dans sa propre Nature, et à devenir nous-mêmes comme des dieux. Ceux qui jouissent de Dieu conservent toujours, il est vrai, leur propre substance, mais en même temps ils revêtent une forme admirable et presque divine, qui les fait paraître plutôt des dieux que des hommes. Le Catéchisme nous donne l’exemple du fer soumis au feu : il devient incandescent, plus proche du feu que de sa première nature de fer : « Ainsi le fer que l’on soumet à l’action du feu, prend la forme du feu ; et bien qu’il ne change pas de substance, cependant il est tout autre, et semble n’être plus que du feu. De même ceux qui ont été introduits dans la gloire du Ciel sont tellement enflammés par l’amour de Dieu que, sans changer de nature, ils diffèrent néanmoins beaucoup plus de ceux qui vivent sur la terre que le fer incandescent ne diffère de celui qui est froid ».
Le Catéchisme conclut : « Pour tout dire en un mot, la félicité souveraine et absolue, que nous appelons essentielle, consiste dans la possession de Dieu. Que peut-il manquer en effet au parfait bonheur de celui qui possède le Dieu de toute Bonté et de toute Perfection ».
A cette Béatitude essentielle, il se joint encore quelques avantages accessoires, qui sont plus à la portée de notre compréhension et qui, par le fait, sont ordinairement plus puissants pour remuer nos cœurs et exciter nos désirs.
« De ce nombre sont ceux que l’Apôtre avait en vue, quand il écrivait aux Romains : « Gloire, honneur et paix à quiconque fait le bien ! ». Outre cette gloire qui se confond avec la béatitude essentielle, ou du moins qui en est inséparable, il est une autre espèce de gloire dont jouiront les Saints. C’est celle qui résultera de la connaissance claire et distincte que chacun aura du mérite et de l’élévation des autres.
Ne sera-ce pas aussi un très grand honneur pour les Saints d’être appelés par le Seigneur, non plus ses serviteurs, mais ses amis, ses frères (Jn 20 17) et les enfants de Dieu ? (Rm 8 15-16) et d’entendre cette parole : « Venez, les bénis de mon Père, possédez le Royaume qui vous a été préparé » (Mtt 25 34). Toutes ces paroles sont si honorables et si glorieuses que nous avons le droit de nous écrier : « Seigneur, Vous honorez vraiment trop vos amis ! » (Ps 138 17).
De plus, Jésus-Christ les comblera de louanges devant son Père Céleste et devant les Anges !
Enfin, si la nature a gravé dans tous les cœurs le désir d’obtenir l’estime de ceux qui brillent par leur sagesse ̶ précisément parce qu’ils sont les témoins et les juges les plus capables d’apprécier le mérite ̶, quelle augmentation de gloire pour les Bienheureux de ce qu’ils auront les uns pour les autres l’estime la plus profonde !
Enfin, pour exprimer cette gloire du Ciel, on peut citer saint Paul : « L’œil n’a rien vu, l’oreille n’a rien entendu, et le cœur de l’homme n’a jamais rien conçu de semblable » (1 Cor 2 9) ; il parle du Ciel… Si, sur la terre, on est heureux de posséder une maison vaste et magnifique, peut-on imaginer rien de plus vaste et de plus magnifique que le Ciel qui brille de toutes parts, et qui reçoit sa splendeur de la Lumière même de Dieu ? Ainsi, on comprend que le psalmiste puisse s’écrier : « Que vos tabernacles sont aimables » (Ps 33 2) ou encore : « Mon âme soupire et se consume du désir de la maison du Seigneur. Mon cœur et ma chair brûlent d’ardeur pour le Dieu Vivant ».
Alors sachant que chacun recevra selon ses mérites, soit peu, soit beaucoup : « Celui qui sème peu recueillera peu ; celui qui sème beaucoup, moissonnera beaucoup » (2 Cor 9 6), travaillons à gagner le Ciel et supplions surtout Marie d’intercéder pour nous, elle qui est toute-puissante auprès de son Fils. Et n’oublions pas, non plus, qu’un moyen très sûr d’acquérir ces joies éternelles, c’est de s’armer de la Foi et de la Charité, de persévérer dans la prière et dans la pratique si salutaire des Sacrements et, enfin, de remplir envers le prochain, tous les devoirs de la Charité. C’est le moyen assuré d’obtenir de la Miséricorde de Dieu qui a préparé cette Gloire bienheureuse à ceux qui L’aiment, l’accomplissement de cette prophétie d’Isaïe : « Mon peuple habitera dans une paix délicieuse ; il sera tranquille sous ses tentes, et jouira du repos au milieu de l’abondance » (Is 32 18).
Oh ! Comme on comprend la préoccupation de l’auteur de cette hymne et comme nous voulons en épouser la pensée et la prière : « Vierge puissante, repoussez les ruses et les attaques de l’antique serpent, pour que, grâce à vous, nous jouissions des joies éternelles des habitants des cieux »