Le sens chrétien de l’histoire
publié dans couvent saint-paul le 21 novembre 2009
Prédication pour le dernier dimanche après la Pentecôte
MBCF,
Nous voilà arrivés au terme de l’année liturgique avec ce dernier dimanche après la Pentecôte. Et ce dimanche est consacré au retour du Christ dans sa gloire, en toute sa Majesté : « Alors le Fils de l’homme apparaîtra dans le ciel et alors toutes les tribus de la terre se lamenteront et elles verront le Fils de l’homme venant sur les nuées du ciel, avec une grande puissance et une grande gloire. Et Il enverra ses anges, avec la trompette et une voix éclatante et ils rassembleront les élus des quatre vents, depuis une extrémité des cieux jusqu’à l’autre ».
J’aime cette perspective d’avenir. J’aime ce futur qui est la lumière du présent.
Toute l’histoire, MBCF, dans la pensée salvifique de Dieu, une pensée de miséricorde et de justice, est dominée par le Christ Seigneur. Il domine les temps. Il est le Maître des temps. Il est la raison des temps de l’histoire. L’histoire se comprend à la lumière du Verbe incarné et uniquement en Lui. Elle a donc sa raison dans la foi, dans la Révélation de Dieu. Je sais que le Fils de Dieu fait homme est le roi de ce monde. Je le proclame la nuit pascale. Je sais « que toute puissance lui a été donnée au ciel sur la terre » (Mt 28 18). L’apparition du Verbe incarné ici bas est pour moi, pour la foi, le point culminant des annales humaines, de l’histoire.
C’est pourquoi la pensée chrétien partage la durée de l’histoire en deux grandes sections : avant Jésus-Christ, et après Jésus-Christ.
Avant Jésus-Christ, de nombreux siècles d’attente, d’attente du Messie promis par la bonté de Dieu, après le péché originel.
Après Jésus-Christ, « une durée dont nul homme n’a le secret, parce que nul homme ne connaît l’heure de l’enfantement du dernier élu. Car ce monde n’est conservé que pour les élus qui sont la cause de la venue du Fils de Dieu dans la chair ».
Avec cette donnée certaine, d’une certitude divine, donc absolue, l’histoire n’a plus de mystère pour nous. Si je tourne mes regards vers la période qui s’est écoulée avant l’Incarnation du Verbe, tout s’explique, à mes yeux. » Le mouvement des races divines, la succession des empires, des civilisations, c’est la route frayée pour le passage de l’Homme-Dieu et de ses envoyés, les prophètes. » Ultimement la « pax romana » est le temps historique favorable à la venue du Messie et à la diffusion universelle de son Evangile. » Mais avant, la dépravation des cités », comme celle de Ninive et de Sodome, « les ténèbres, les calamités inouïes des siècles, c’est l’indice du pressent besoin que l’humanité éprouve de voir Celui qui est à la fois le Sauveur et la Lumière du monde ». Non sans doute que Dieu ait voué à l’ignorance et au châtiment cette première période de l’humanité, loin de là. Je sais que les secours lui sont assurés et c’est à elle qu’appartiendra Abraham, le Père de tous les croyants à venir. « Mais il est juste que la plus grande effusion de la grâce ait lieu par les mains divines de Celui sans lequel nul ne peut être juste ».
Enfin, Il vint. « Et le Verbe s’est fait chair » et la lumière et la vie se répandirent de par toutes les nations…C’est l’heure de la gentilité… après l’heure hébraïque… qui a progressé merveilleusement au milieu de la puissance romaine. Et alors après son œuvre en Terre Sainte, « tout est consommé » par le sacrifice annoncé et réalisé par l’Agneau de Dieu. Alors Jérusalem cède ses droits et ses honneurs à Rome. Titus est l’exécuteur des œuvres du Père céleste qui venge le sang de son Fils éternel. Quant à l’Empire païen – Rome – il a bâti, sans le savoir, la capitale du royaume de Jésus-Christ…Mais avant ce règne de Paix, « Rome lance ces édits sanglants qui n’auront d’autres effets que de montrer aux siècles futurs – comme aujourd’hui en Chine, au Vietnam, au Soudan, aux Indes et Pakistan – la vigueur surnaturelle du christianisme. Puis ce sont les invasions des barbares et sous leur force, Rome capitule. Mais le Christianisme qui a pris sa force sur le tombeau de Pierre rayonnera sur l’univers. Et depuis, quelles que soient les attaques, au milieu du siècle jusqu’à la consommation des siècles, se conserve l’Eglise à travers le temps, sans « mélange dans sa doctrine, sans altération dans sa hiérarchise, sans suspicion dans sa durée, sans défaillance dans sa marche. Les hérésies, les scandales, les défections, les conquêtes, les révolutions, rien n’y a fait. Repoussée d’une terre, elle s’est avancée sur une autre, toujours visible, toujours catholique, toujours conquérante, toujours éprouvée – le disciple n’est pas au dessus de so Maître. Ils m’ont persécuté. Ils vous persécuteront aussi…Si nous avons été depuis quarante ans les spectateurs d’une « ruine », nous serons, je crois, les spectateurs du relèvement de l’Eglise sur ses propres ruines et le moteur en sera la liturgie retrouvée et vivante.
Tout ceci pour dire, MBCF, que l’histoire a une vocation surnaturelle. Que les nations sont le domaine particulier de l’Homme-Dieu. Ce domaine a été annoncé surnaturellement. C’est l’Histoire Sainte. Ce domaine a été inauguré, c’est le mystère de l’Incarnation rédemptrice.
Ce domaine sera consommé à la Parousie, dans le retour en gloire du Dominateur, NSJC
Il n’y a plus pour nous de mystère dans la succession des siècles, plus de vicissitudes inexplicables dans la succession des temps. Tout va au but inexorablement. Tout est sous l’empire de l’Homme-Dieu et de son Eglise. « Alors le signe du Fils de Dieu apparaîtra dans le ciel ». Voilà la donnée divine qui éclaire mon intelligence et mon jugement lorsque je jette les yeux sur « la carte du monde ». L’humanité, de par la bonté de Dieu, a une vocation surnaturelle. Son terme c’est le ciel ou la damnation. Et je n’oublie jamais cette parole de Dieu : « Dieu veut que tous les hommes soient sauvés et arrivent à la connaissance de la vérité ».
Mais je sais aussi qu’il y a à l’œuvre dans le monde et l’histoire, » l’éternel ennemi de Dieu et de l’homme. » Aussi je n’expliquerai jamais, comme le fait le texte de « Gaudium et Spes » du Concile, le mal dans le monde par le seul effet de la perversité humaine et de ses passions. « Il n’y a d’histoire vraie et complète que celle qui n’omet pas à plaisir la principale cause des désordres mondains. » Les politiques, aujourd’hui, pour la plupart, étant souvent au service de ce Prince du mal….
Je sais aussi que le règne du Christ approche toujours plus à chaque révolution des peuples. Ce règne du Christ est le but de l’histoire des peuples. Et toute l’histoire n’a qu’un but : celui de préparer la voie au Verbe incarné et aujourd’hui son règne prochain.
Et comment s’opéra la conquête du monde méditerranéen, et comment s’opère la conquête de l’Asie ? Par la foi en Jésus-Christ crucifié, apportant au monde des mystères à croire et des vertus à pratiquer. Aux yeux des premiers chrétiens, l’ère du Christ n’était pas l’ère de la civilisation. Elle n’était pas encore ! Pour eux, – il en doit être ainsi pour nous -, l’ère du Christ était l’ère du salut offert à chaque homme, à la condition de sacrifier les biens de la vie présente à ceux de la vie future dont le sentier venait d’être ouvert par le Rédempteur. Il ne fallut ni plus ni moins pour régénérer le monde. De nos jours, il ne faudra ni plus ni moins pour le sauver. Voilà la vraie politique chrétienne. « Et c’est pourquoi les hommes ont plus besoin qu’on leur répété que Jésus-Christ est venu pour les racheter qu’il est nécessaire de leur dire sur tous les tons que l’objet de sa mission a été de les civiliser ». La civilisation n’est qu’un effet de la prédication du Christ, qu’une conséquence de l’Evangile. « Ce qui presse, ce qui est à propos, c’est de songer aux chrétiens qui ont besoin d’être soutenus et ralliés. Or vous ne le ferez qu’en promulguant à haute voix que, sous le règne de César Auguste, le Fils unique de Dieu a daigné prendre chair au sein d’une Vierge et s’offrir en sacrifice pour racheter les péchés du monde et briser le joug de Satan qui tenait l’homme asservi ». Et qu’Il reviendra à la fin des temps dans la gloire pour réunir tous les élus après de Lui, à sa droite et mettre les réprouvés à sa gauche pour le feu éternel. Ainsi l’annonce du plan divin est la chose la plus importante à annoncer.
« Je crois qu’Il a souffert sous Ponce Pilate, qu’Il a été enseveli; qu’Il est ressuscité le 3ème jours selon les Ecritures; qu’il est monté au ciel et assis à la droite du Père d’où Il viendra juger les vivants et les morts et dont le règne n’aura pas de fin ».
Voilà notre catéchisme. La première nécessité aujourd’hui, est de fortifier les chrétiens dans leur foi. La seconde est d’en accroître le nombre. Si nous obtenons le premier but, nous n’aurons pas perdu notre temps. J’en profite pour féliciter les mères de famille pour le dévouement qu’elles manifestent pour l’éducation chrétienne de leur enfants. Elles ne craignent pas leur peine… La société se meurt parce qu’on ne lui parle plus franchement de Jésus-Christ. La Laïcité est, sous ce rapport, la pire des choses. Nous le répétons : la destinée du genre humain est une destinée surnaturelle grâce à l’Incarnation du Christ, à sa glorification entraînant ave Lui, dans son humanité glorifié, – comme premier glorifié -, tout le genre humain. Qu’il en soit ainsi pour nous, vos familles, vos enfants et les prêtres qui sont à votre service.
Amen.